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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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En 1958, après le 13 mai, deux interventions le mènent sur la piste. Le

colonel de Boissieu, gendre du général de Gaulle, lui demande de la part de

Michel Debré, devenu garde des Sceaux du gouvernement de Gaulle, de

« ne pas insister pour que le procès du bazooka vienne à l'audience ». Même

requête, un peu plus tard, de Christian de La Malène, un proche du même

Michel Debré. Salan commence à percevoir la vérité. Il estimera l'approcher

deux ans plus tard.

A Madrid, général en exil, il retrouve Castille et Fechoz, libérés de la

prison Barberousse dans le tumulte des Barricades. Castille, fidèle à ses

convictions Algérie française, se prépare à se battre dans l'O.A.S. et se

place sous les ordres de celui qu'il voulait naguère assassiner. Il révèle ce

qu'il sait. La trame de l'affaire se remonte dès lors aisément dans l'esprit de

l'ancien commandant en chef.

En 1957, général républicain, Raoul Salan n'apparaît pas susceptible

d'emboîter le pas à ceux qui aspirent à renverser le régime et rappeler le

retraité de Colombey. Le général Cogny, commandant supérieur au Maroc,

et dont l'ambition n'est pas la moindre qualité, peut être l'homme de la

situation. L'idée de manœuvre est simple : éliminer Salan, le remplacer par

Cogny tout acquis, disposer ainsi à Alger d'une autorité capable d'entraî-ner

l'armée et d'intervenir sur le cours des événements. Cette thèse est plausible.

Les événements l'ont vérifiée. Par son « Vive de Gaulle », le 15 mai 1958,

le général Salan a ouvert les portes au retour du gaullisme.

La conviction de Salan est faite. L'homme et l'équipe qui ont fomenté ce

plan, qui ont provoqué mort d'hommes, s'appellent Debré et les siens.

Devenu chef de l'O.A.S., Salan ne mâchera pas ses mots à l'ancien rédacteur

du Courrier de la colère devenu Premier ministre : « Je vous désigne

nommément comme l'assassin du chef de bataillon Rodier. »

Les jurés du tribunal militaire, lors du procès Salan en 1962, épouserontils

cette thèse ? Ce n'est pas impossible. Les déclarations embarrassées de

certains témoins, la déposition sans ambiguïté d'un haut magistrat militaire,

le général Gardon, qui confirme l'intervention de Christian de La Malène,

ne seront pas insensibles aux jurés 1 . L'un d'entre eux, le professeur Pasteur

Vallery-Radot, précisera au général Salan : « Cela vous a beaucoup

servi... » Effectivement, puisque l'accusé bénéficiera de circonstances

atténuantes l'éloignant de la peine capitale.

Dans ses Mémoires, Raoul Salan énoncera à nouveau ses convictions :

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