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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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Mais très vite l'affaire s'estompe. L'expédition de Suez a une autre

dimension et relègue au fait divers l'arraisonnement du D.C.-3 de Royal Air

Maroc. Les internés de la Santé sont oubliés. Des nouveaux venus, les

Abbas, les Francis, les remplacent avec sans doute plus d'expérience

politique pour conduire le combat diplomatique du F.L.N. En Algérie

même, les maquisards, qui chaque jour jouent leur vie, ont d'autres soucis.

L'arrestation de l'équipe Boudiaf-Ben Bella n'est qu'un épisode sans portée

immédiate au plan pratique.

Il faudra du temps et de l'habileté pour transformer les captifs en martyrs

d'abord, en drapeaux ensuite. A l'automne de 1956, on n'en est pas encore

là.

Le débarquement de Suez, une quinzaine de jours plus tard, mérite

attention dans la mesure où il témoigne de la volonté du gouvernement

français, celui de Guy Mollet, de porter le fer là où il estime se trouver le

cœur du F.L.N. Depuis la Toussaint 1954, l'Egypte de Nasser, par sa

propagande sur les ondes de la Voix du Caire, par l'aide apportée – on se

souvient de la cargaison de l'Athos –, par l'accueil réservé aux Algériens

exilés, apparaît à la France comme le cerveau et le moteur de l'insurrection.

Cela est vrai, mais c'est oublier ou sous-estimer les combattants de

l'intérieur qui portent à bout de bras le combat. C'est donner aux réfugiés du

Caire, Khider, Ben Bella, etc., une audience qu'ils n'ont pas. Le congrès de

la Soummam l'a prouvé. Le vrai pouvoir du F.L.N. en 1956 est en Algérie.

Il sera par la suite en Tunisie et au Maroc lorsque les combattants seront à

bout de souffle.

La genèse et le déroulement de l'expédition de Suez sont connus et

sortent du cadre pur de la guerre d'Algérie. La nationalisation du canal de

Suez donne aux Anglais et aux Français, liés par des intérêts économiques

communs sur cette voie d'eau indispensable à leur ravitaillement

énergétique, l'occasion de se débarrasser d'un dictateur arabe encombrant.

Israël, toujours menacé dans l'existence de son jeune Etat, y trouve son

compte. Comme prévu, il déclenche l'attaque appuyé par un support

logistique et aérien franco-anglais. Le 5 novembre au matin, les paras

anglais et français sautent sur Port-Fouad et Port-Saïd. Le 2 e R.P.C. de

Château-Jobert enlève ses objectifs de façon magistrale. Le 1 er R.E.P.,

amené par mer, le rejoint. Les routes du Caire et de Suez sont ouvertes

devant un adversaire en déroute. La victoire totale échappe devant la

menace d'une intervention soviétique et la dérobade américaine. L'affaire,

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