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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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les rigueurs du Constantinois. Il permute avec le 9 e R.C.P. pour rejoindre la

25 e D.P. à Philippeville.

Ces changements, ces affectations, sont la résultante visible des

barricades. Ils ne sont pas obligatoirement les plus graves. A certains

égards, le jeu normal des rotations aurait provoqué certaines des mutations.

Il y a beaucoup plus sérieux.

Les Européens perdent leur propre autodéfense officielle. Les unités

territoriales, qu'on a vues parader sur les barricades, sont dissoutes. Sans

représenter un potentiel militaire apte à faire campagne, elles comprenaient

du moins des hommes en armes et régulièrement organisés. Ces fusils, ces

P.M., les Européens pouvaient les opposer à une Saint-Barthélemy

déclenchée par le F.L.N. Désormais ils ont les mains nues. Plus même :

quiconque ose se présenter armé apparaît comme un rebelle justiciable de la

rigueur des lois. De Gaulle a pu, en toute liberté, dans la foulée de la

réprobation des barricades, désarmer les anciens d'Italie ou des Vosges.

Ceux-ci n'ont rien obtenu en contrepartie. Pas même l'honneur.

L'insurrection d'Ortiz, de Lagaillarde et de leurs amis creuse un peu plus

le fossé entre l'armée et la population européenne. L'armée n'a jamais été

véritablement en union avec les pieds-noirs. Le contingent subit son séjour,

même s'il fait son devoir très correctement dans l'ensemble. L'armée

d'active aspire à plus de justice, plus d'égalité pour le monde musulman.

Elle reproche âprement à leurs auteurs une situation créée par un certain

égoïsme. Il serait, à l'extrême, faux de dire qu'un divorce existe entre civils

et militaires. Les premiers entendent conserver, et c'est normal, certaines de

leurs positions acquises à grand-peine. Les seconds savent qu'ils sont là

pour secourir et aider des compatriotes, des Français comme eux, même si

parfois ils se reconnaissent mal en « certains Sicilo-Maltais ou Ibériques ».

En contrepartie, ils entendent n'être point seuls à la tâche. L'armée

française, en cet hiver 1960, s'efforce d'écraser à jamais la rébellion.

« Jumelles », « Pierres précieuses » battent leur plein. Partout l'on traque le

« fell », de jour, de nuit, dans la neige et le vent. Les bivouacs à 1 500 ou

2 000 mètres sont durs. Les accrochages sévères. Les bilans éloquents mais

coûteux.

Les nouvelles orientations du chef de l'Etat n'apparaissent pas encore.

L'heure est à la guerre.

Aussi les coups de fusil ou les rafales de P.M. sur les gardes mobiles

sont-ils, aux yeux de tous, criminels. Les hommes des djebels ne

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