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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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Certains de ces prisonniers ainsi conditionnés sont relâchés ou mis dans

les conditions d'une évasion aisée. D'autres se voient proposer une mission

de conciliation qu'ils acceptent en toute bonne foi ou pour retrouver leur

liberté 11 . Ils ne se doutent pas qu'ils partent munis de documents

compromettants camouflés dans leurs vêtements ou une semelle de

chaussure. Autant de preuves qui par la suite les accableront.

Ces hommes, de retour près des leurs parlent. Ils révèlent ce qu'ils ont

découvert. Ils dénoncent de supposés coupables. La suspicion, alors,

envahit les chefs des maquis. Pour leur permettre d'en savoir plus, ils

soumettent à la question ces anciens prisonniers des Français, suspectés à

leur tour. La torture fait raconter les pires romans.

La « bleuite » est née du nom de ces bleus de chauffe dont Léger a

habillé les ralliés qui l'accompagnent dans la Casbah. La « bleuite », c'est la

maladie de la suspicion, de la délation. Elle décime, des atrabilaires comme

Amirouche s'en mêlant, les maquis de l'A.L.N. Trois mille morts en wilaya

III et Grande-Kabylie, cinq cents au moins en wilaya IV de l'Algérois. Les

victimes sont presque toutes des cadres. L'A.L.N. est durement affectée par

ce mal qu'elle sécrète elle-même. L'absence de combattants, injustement

suspectés et sacrifiés à la vindicte de chefs soupçonneux par la ruse d'un

état-major algérois, pèsera lourdement à l'heure des grandes batailles du

plan Challe 12 .

Elle est d'autant plus affectée que la discorde régnait déjà, bien avant la

« bleuite ». Ben Boulaïd, le chef de la wilaya I, est mort, on s'en souvient,

dans des conditions suspectes. Chihani Bachir, son successeur, le meurtrier

de l'instituteur Monnerot et du caïd Hadj Sadok, est liquidé par les siens.

Ses mœurs en sont la raison officielle, mais derrière, comme toujours, se

profilent les querelles d'hommes et de clans. Afin de remettre de l'ordre

dans cette wilaya I que divisent des rivalités ancestrales, le congrès de la

Soumman a désigné Amirouche et Chérif Mahmoud. Les deux hommes, le

premier surtout, ne sont pas des tendres. Pour échapper aux coups, Adjoul

Adjoul, l'un des vétérans de l'insurrection dans l'Aurès, se rallie aux

Français avec nombre des siens.

En Tunisie, la situation n'est pas plus brillante. Le chef des unités

algériennes est un fidèle de Ben Bella, Ahmed Mahsas. Il se heurte à

l'équipe kabyle Krim Belkacem, Ouamrane, qui veut prendre en main l'outil

militaire qui se forge chez Habib Bourguiba. Arrêté, il sauve sa vie en

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