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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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ironie du sort – la place à un confrère : le pharmacien Ben Khedda. Ben

Youssef Ben Khedda n'a que quarante et un ans, mais est déjà un vieux

militant nationaliste. Il a appartenu au P.P.A. puis au M.T.L.D. Il fut alors,

en 1954, dans la frange dite centraliste, s'opposant à Messali Hadj. Il a

participé au congrès de la Soummam avant de diriger la zone autonome

d'Alger en 1956/57 3 . Le voici au premier plan au terme d'un itinéraire qui

n'a pas la sinuosité de celui d'un Ferhat Abbas. On lui en sait gré.

Les perspectives de la victoire proche, l'expérience acquise permettent

d'écarter les services de l'auteur du Manifeste. Un autre « centraliste », Saad

Dahlab, compagnon de Ben Khedda, accède aux Affaires étrangères. Il

remplace Krim Belkacem, qui passe à l'Intérieur, aux lieu et place de Ben

Tobbal qui ne reste que ministre d'Etat. C'est un compromis. Les militaires

sont toujours là derrière Boumediene et les trois « B » aussi. L'antagonisme

irréductible des deux clans devra un jour trouver une solution car si

Boumediene et les siens ne sont pas vraiment membres à part entière du

G.P.R.A., leur ombre menaçante plane sur tous les débats.

Dans l'immédiat, c'est donc à Ben Khedda, plus dur, plus intransigeant,

qu'il appartient de guider l'attelage de la résistance algérienne sur le dernier

parcours qui, côté français, pourrait apparaître sans obstacle puisque de

Gaulle lâche encore du lest.

Le 5 septembre, dans une conférence de presse, il reconnaît que le Sahara

fait partie de l'Algérie et qu'« il n'y aurait pas un seul gouvernement

algérien, quelle que soit son orientation par rapport à la France, qui ne doive

revendiquer sans relâche la souveraineté algérienne sur le Sahara ». Un

lourd préalable disparaît et de Gaulle, dans sa résolution d'en finir, fait là

une concession de taille au détriment des stricts intérêts français. Pour peser

plus encore sur ses partenaires du F.L.N., il joue même sur la partition,

précisant que la France pourrait être amenée « à regrouper dans une région

déterminée les Algériens de souche européenne et ceux des musulmans qui

voudraient rester avec la France ». Cadeau et menace alternent ainsi pour

provoquer la reprise et l'accélération de pourparlers.

Mais la guerre d'Algérie dure depuis trop longtemps, a fait trop de

victimes, engendré trop de haines, d'engagements et de crainte pour que les

choses soient si simples. D'autant que de Gaulle n'entend négocier qu'avec

une seule partie : l'adversaire. Il écarte des entretiens Européens,

musulmans pro-français. C'est donc encore faire abstraction de trop

d'interlocuteurs alors que la guerre continue en Algérie et même en France.

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