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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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De France d'abord, comme le soulignent les chiffres ; des provinces

méridionales surtout, sans oublier la Corse. La recherche d'un travail, d'une

nouvelle chance, les pousse tout comme l'obligation politique. En 1848,

après les journées de juin, l'exode des condamnés et exilés commence. Il en

sera de même après le coup d'Etat de Louis-Napoléon Bonaparte, le

2 décembre 1851, 10 000 personnes environ à cette occasion. Il y aura des

Parisiens, aussi, après la Commune ainsi que 5 000 Alsaciens-Lorrains au

lendemain du traité de Francfort. Ceux-là ont librement opté pour la France

sur une autre terre française. Parfois certains débarqués sous l'uniforme

demeurent sur place troquant le fusil contre la charrue. Bugeaud voudra

retrouver le lointain exemple des légionnaires romains devenus colons sur

le sol africain.

Sans qu'il y ait là une règle absolue, dans l'ensemble, ces Français de

souche s'établissent plutôt dans l'Algérois. Les deux autres provinces –

voisinage aidant – ont un apport plus étranger. Ils viennent d'Alicante, de

Valence, de Catalogne même, de Mahon, ces rudes paysans habitués aux

terres arides et aux cultures maraîchères. L'Oranie aura par eux un petit,

pour ne pas dire un gros, accent espagnol. En revanche, à l'autre extrémité

du pays débarqueront Maltais, Toscans, Napolitains. Guère riches eux aussi.

Ils apportent leur amour du négoce et de la mer. Beaucoup seront marins

pêcheurs à Stora, La Calle, Herbillon 3 .

Bref, de cet environnement méditerranéen surgit un brassage qui gardera

les traits des pays d'origine. Contingent latin en terre musulmane, tel sera ce

peuple, fier, enjoué, accueillant, dur à la besogne. Parfois outrancier,

accapareur, divisé dans ses zizanies internes et qu'on baptisera un jour « les

pieds noirs » 4 . Par la sueur et le sang il aura eu le mérite de participer à la

naissance de l'Algérie française.

Il y a, et on ne l'a peut-être pas assez souligné, deux colonisations :

l'urbaine et la rurale. Cette dernière, où le terme colon retrouve sa racine

latine – colere : cultiver –, est une véritable épopée de sueur et de sang. Que

d'énergie et d'héroïsme pour les résultats obtenus, dont les cartes donnent

une illustration fidèle. A chaque édition la tache de la broussaille recule

pour faire place aux cultures.

Il y eut l'insécurité, les razzias, les révoltes. Il fallut supporter le climat et

ses fièvres dans les zones insalubres. Les épidémies allongèrent les listes

des victimes. A ces maux s'adjoignait l'incertitude des résultats et de leurs

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