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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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Personne ne saurait s'avouer officiellement antifrançais ou antimusulman.

Ce serait la contradiction même du combat mené et contraire

aux instructions reçues de la tête de l'O.A.S. Salan et les militaires sont

profondément patriotes et égalitaires. Ils ne défendent ni hectares de vignes

ni hangars sur le port. En revanche, il peut y avoir de mauvais Français et

de mauvais musulmans.

En tête des mauvais Français il y a une figure de proue : l'homme de

l'Elysée, celui dont vient tout le mal, celui qui se prépare à livrer l'Algérie.

Celui-là, il cristallise toutes les haines. Il est le chacal, l'animal pestiféré, la

bête à abattre, et le jargon populaire de Bab-el-Oued ou de la Marine ne

manque pas d'images sur ce thème... Ses comparses ne pèsent pas plus dans

l'échelle des valeurs et leur élimination ne pose pas de problèmes de

conscience. Ils sont, comme leur maître, de vils renégats à faire disparaître.

La lutte contre ces traîtres, ces agents de l'anti-France – ces hommes de

main de De Gaulle que, dans quelques semaines, l'on désignera sous le nom

de « barbouzes » – prendra ainsi très vite un caractère de combat sans merci

à l'égal de celui à mener contre le F.L.N.

Contre ce dernier, l'O.A.S. n'a pas la qualité des renseignements des paras

de la bataille d'Alger. Certes, elle dispose d'informateurs, de bénévoles

combien nombreux dans tous les milieux des polices locales. Mais les

commissariats de quartier repèrent plus facilement le sympathisant F.L.N.

que le terroriste infiltré à la Casbah ou à Diar-el-Mahcoul. Les attentats ont

donc très souvent un petit côté aveugle. La vieille animosité contre l'Arabe

s'en mêle. Qui n'a pas un ami, un parent proche, un frère ou un fils à

venger ? Il y a eu tant de victimes depuis le 1 er novembre 1954 ! Des

Européens innocents continuent de tomber si ce n'est chaque jour, tout au

moins chaque semaine ou chaque mois. La riposte jaillit :

« On prend les MAT ! »

Et les MAT, ces pistolets-mitrailleurs réglementaires de l'armée française,

ne manquent pas à Alger ou à Oran.

Une équipe surgit et tire une rafale. Des musulmans tout aussi innocents

tombent.

Racisme ! crient les uns. Vengeance ! ripostent les autres !

Le brasier, après sept ans de guerre, de sang, de terrorisme, est prêt pour

s'embraser.

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