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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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Ces villages de colonisation impliquent obligatoirement terres de

colonisation et par conséquent attribution à un titre quelconque. Le vocable

du temps s'appelle concession. Ces concessions sont d'inégale valeur.

Certaines sont accordées gratuitement, d'autres prévoient un versement

comptant et une rente annuelle. La propriété peut aussi ne devenir définitive

qu'au terme de quelques années d'exploitation. Ces attributions sont

populaires et s'adressent à la grande masse des postulants. Les surfaces

distribuées restent assez faibles : une dizaine d'hectares en moyenne, parfois

un peu plus 9 . Les hommes politiques, les personnages influents, se taillent

des centaines d'hectares. De grosses entreprises à caractère capitaliste

obtiendront même des lots très importants. Ainsi, en 1860, la Compagnie

genevoise se procure-t-elle 20 000 hectares dans la région de Sétif. Dans le

même temps, la société de l'Habra et de La Macta en obtient 25 000. La

Société algérienne – qui deviendra plus tard la Compagnie algérienne –

acquiert 100 000 hectares de forêts dans le Constantinois. Elle s'affirmera

ainsi comme l'un des principaux exploitants de liège d'Algérie.

Fait notable, des musulmans bénéficient de ces distributions.

L'administration entend remercier des chefs de tribus ralliées ou des

indigènes engagés vis-à-vis de la France. Elle espère aussi se les concilier

définitivement. On voit de la sorte le conseil d'administration d'Alger

approuver l'attribution, dans la vallée du Saf-Saf, près de Philippeville,

de 3 lots de 150 hectares chacun à Ali bou Afia, sous-lieutenant du 2 e

régiment de spahis, à Ahmed ben Kassem, cheikh des Béni-Béchir, à

Mohamed ben Ali, cheikh des Beni bou Naïm. Dans le même temps et dans

la même région, le frère d'Odilon Barrot, lequel sera un temps ministre de la

Justice, obtient plus de 600 hectares.

D'où viennent ces terres qui passent ainsi généralement dans des mains

européennes pour être exploitées ?

Elles ont en gros trois origines essentielles : l'achat, la valorisation d'une

nature sauvage jusqu'alors, la spoliation du précédent occupant par droit de

conquête.

Des ventes, il y en eut, peut-être pas toujours très honnêtes, mais il y en

eut et même dans des quantités importantes. Dans les débuts, les vendeurs

estiment que la présence française ne durera pas. Il y a là matière à une

excellente spéculation : vendre aujourd'hui ce que l'on récupérera

gratuitement demain. Calcul erroné qui débouche sur des changements de

main surtout aux abords des villes. Certaines mesures favorisent les

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