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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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juge passablement farfelu. Il le devine honnête et cette qualité compte à ses

yeux.

Début mai, Degueldre réussit à reprendre contact avec les principaux

conjurés militaires dispersés dans Alger : Gardes, Godard, Sergent, Godot.

L'épreuve n'a pas infléchi leur détermination. Ils sont bien décidés à aller

jusqu'au bout. Deux colonels, pourtant, rompent le fer. Lacheroy et Argoud

s'exilent. Le départ du second sera, par la suite, amèrement ressenti par le

général Salan. Il lui écrira en vain pour lui demander de venir prendre un

commandement important dans l'O.A.S. Algérie. Argoud en décidera

autrement. Pour lui, la page de l'Algérie est pratiquement terminée.

Incarcéré un temps à Madrid par Franco, puis relégué aux Canaries, il

finira, au printemps 1962, par rejoindre l'Europe. Là, le combat se termine

et Sergent et ses camarades occupent le terrain. Réduit à un rôle d'étatmajor

à un niveau élevé mais sans pouvoir effectif, le colonel Argoud

poursuivra, après le 1 er juillet 1962, son action contre le pouvoir gaulliste.

Elle n'appartient plus à la guerre d'Algérie même si elle en est une des

séquelles.

Civils, avec Susini, militaires, avec Degueldre, se retrouvent dans un

appartement algérois à la mi-mai. Grâce à Susini, le sigle O.A.S. est devenu

une réalité physique sur les murs d'Alger. A priori il n'est plus un mythe.

Godard peut définir l'organigramme de cette O.A.S. naissante et fixer les

places de chacun sur un échiquier qui est encore essentiellement urbain et

limité.

Le sommet évident de la pyramide est Raoul Salan, avec qui le contact a

été renoué par Jean Ferrandi. Edmond Jouhaud est naturellement son

second. Le prestige des deux généraux est intact, surtout vis-à-vis de la

population, en dépit de l'échec du 22 avril. Le bouc émissaire de la tentative

avortée est Maurice Challe. Entre les civils et l'ancien commandant en chef

de janvier 1960 se dressent toujours les barricades.

« Pourquoi a-t-il refusé notre concours durant le putsch ? » « Pourquoi a-

t-il flanché si vite ? » accusent les uns et les autres. Certains même

n'hésitent pas à le qualifier de sous-marin gaulliste, la virulence

méditerranéenne s'en mêlant. Pour Raoul Salan, en revanche, quel

revirement brutal ! Les temps du bazooka sont loin. Du 22 avril, on ne

saurait rien lui reprocher. Il est arrivé trop tard et Challe monopolisait les

pouvoirs. On est heureux et reconnaissant de le voir, lui, le général bardé

d'honneurs, tout remettre en cause. Les « Vive Salan » s'étalent sur les murs

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