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Pierre Montagnon - La guerre dAlgerie

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l'ensemble de l'équipage, reçoit par radio d'Alger l'ordre de se dérouter pour

se poser à Maison-Blanche.

Après quelques hésitations légitimes il obtempère 9 . Sur le terrain, le

comité d'accueil se met en place. Robert Lacoste, de retour de son Périgord,

vers 20 heures, apprend l'événement. Pratiquement, les jeux sont faits.

Loyalement, le ministre résident entérine les décisions de ses subordonnés.

Dans le climat de guerre et de passion qui règne à Alger, le coup à porter à

la rébellion paraît trop gros pour le refuser. L'armée, la population

européenne, ne comprendraient pas un contrordre émanant du représentant

de la France. A 21 heures, le D.C.-3, dont les passagers sont persuadés

qu'ils atterrissent à Tunis, touche la piste de Maison-Blanche. Gendarmes et

services de sécurité se précipitent sur l'appareil à peine immobilisé.

A l'appel de son nom, l'ancien adjudant de l'armée française a un réflexe

militaire :

– Ben Bella !

– Présent !

Menottes aux poignets et sans avoir fait usage de leurs armes, les

Algériens foulent le sol de leur terre natale. Ils sont prisonniers pour près de

six ans. La Santé, après les interrogatoires algérois, sera leur première

étape.

Cette captivité les coupera des réalités de la guerre mais finalement les

servira. Martyrs tout d'abord, ils deviendront des drapeaux par la suite

lorsque les colonels de l'A.L.N. rechercheront des alliés dans ces hommes,

dans un premier temps, voués à l'oubli, décriés même ! Certains de leurs

compagnons, comme Ouamrane, leur reprocheront d'avoir manqué de

défiance et de s'être rendus sans se battre 10 .

Côté français, on exulte. Pour peu, la presse et l'opinion croiraient la

rébellion décapitée et par là même condamnée. Ben Bella a eu la lucidité

d'affirmer : « Cela ne changera rien ! » et il a raison.

Il y a des réserves. Guy Mollet est embarrassé de ce rapt, contraire aux

règles du droit international, qui lui est imposé. Marocains et Tunisiens

clament leur indignation. Mohamed V s'élève contre cette atteinte aux

règles de l'hospitalité car il regardait les Algériens comme ses hôtes. Alain

Savary, le ministre des bons rapports avec Tunis et Rabat, démissionne pour

ne pas couvrir un acte qu'il désapprouve. Il y a, une fois encore, des

séquelles tragiques. Des français sont victimes de l'exaltation marocaine :

trente tués à Meknès.

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