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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 126 Écriture du gascon<br />

à côté de plusieurs problèmes importants. Mais en un temps où ceux qui s’intéressaient à la langue<br />

gasconne l’avaient apprise au berceau et la parlaient couramment, les imperfections de la norme<br />

passaient inaperçues, comme le sont celles de la norme française pour les Français instruits.<br />

10 – La graphie des “Trovadors”<br />

Tandis que le Félibrige s’installait en Béarn avec l’Escole Gastou Febus et ses normes<br />

graphiques modernes adaptées de Mistral, un mouvement de type classique, quelque peu dissident,<br />

était en train de se développer au sein du Félibrige. Né en Limousin avec l’abbé Joseph Roux<br />

(1834-1905), il avait trouvé en Languedoc deux missionnaires zélés, les instituteurs Antonin<br />

Perbosc (1861-1944) et Prosper Estieu (1860-1939). Il ne s’agissait pas moins que de restituer la<br />

langue d’oc dans ce qu’elle était du temps des Toubadours, en commençant par le retour à la<br />

« graphie des Troubadours »; en parallèle, ces instituteurs anticléricaux “récupéraient” la Croisade<br />

albigeoise comme moyen de lutter contre l’Église et de dresser le Midi contre le Nord.<br />

Les félibres béarnais et gascons ne pouvaient ignorer ce mouvement.<br />

I – L’échappée classique de Simin Palay (1909-1921)<br />

Le premier à s’y être engagé, au moins par quelques écrits, fut Simin Palay (1874-1965),<br />

malgré un profond attachement à l’Église catholique que dénonçait Perbosc :<br />

« … A Perpignan c’est parfait. Mais cela nous amène Amade, très bon Majoral, mais<br />

universitaire couleur Sarrieu, qu’il faudra bien avaler, le plus tard possible. Et puis Palay !<br />

Tous cléricaux ! C’est dégoûtant ! » (lettre à Estieu du 10 décembre 1909, citée par<br />

Barthés, 1987, 100).<br />

En tout cas, Palay entra dans le jeu par un long poème Toulouse ! primé aux Jeux Floraux de<br />

Toulouse (Reclams, Février à Mai 1909, pp. 30, 54, 77 et 99), mais en graphie de l’Escole Gastou<br />

Febus. Cependant, que le baron Désazars de Montgaillard, membre du jury des Jeux floraux, ait<br />

apprécié l’œuvre de Palay (Barthés, ib., 104) n’était pas du gout de Perbosc qui écrit à son ami :<br />

« … Désazars m’a dit que ça valait mieux que rien, que c’était au moins un<br />

hommage, tu vois la suite. Palay me répugne de plus en plus. Il faut que tu travailles à le<br />

démolir, en montrant son insincérité. J’espère qu’il ne sera pas élu » (lettre à Estieu, du 10<br />

juin 1911 in Barthés, ib.).<br />

Palay n’en continue pas moins et compose un autre poème en 1911, Sant Exupère, Salvador<br />

de Toloza; Toulouse est toujours là, mais Palay semble ne plus vouloir revenir sur la croisade<br />

albigeoise, sans doute trop exploitée par le courant languedocien, et célèbre un évènement du V e s.<br />

Mais cette fois, le poème est écrit dans la graphie de Perbosc-Estieu et sera publié dans Lo Gai<br />

Saber, revue de l’Escòla occitana sur laquelle je reviendrai bientôt; il y est présenté comme<br />

« Dialecte biarnés am {avec} grafia neo-romana. » (1920, n° 7, pp. 168-170, n° 8, pp. 186-188 et<br />

1921, n° 9, pp. 10-12); les Reclams de Biarn e Gascougne en feront seulement mention : « Le Gai<br />

saber de Toulouse publie le poème : Sent Exupère de Palay » (n° 2 de Février 1921, p. 31).<br />

En fait, outre l’emploi de -a en finale féminine et de o pour /u/, c’est un curieux mélange de<br />

formes languedociennes (Sant, al, del, forbis, bèl, asalt, filh, saure, jorn, captal… pour Sent, au,<br />

deu, hrobeix, bèth, assaut, hilh, saber, dia, capdau…) et de rares formes ou mots béarnais (cade,<br />

Mèste, ad arond, baxar… pour cada, Mèstre, (a)dereng, baissar…), voire d’archaïsmes (ab pour<br />

dab); et abandon de l’énonciatif que, des possessifs “articulés”. On remarque en baxar l’emploi pour<br />

/#/ du x de la vieille graphie béarnaise et gasconne, mais il vaut [ks] dans fixar du vers précédent et

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