Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Jean <strong>Lafitte</strong> 236 Écriture du gascon<br />
« Mon idée fondamentale est que notre graphie doit représenter avec le plus possible<br />
de fidélité la réalité orale. Si nous ne faisons pas fonctionner, ainsi, l’occitan comme une<br />
langue vivante, nous y ajouterons des difficultés théoriques. Nous en avons bien assez avec<br />
les difficultés pratiques, c’est à dire “sociales”. » (J. Taupiac, Occitans ! n° 63, Sep.-Oct.<br />
de 1994, p. 9).<br />
Mais ce principe phonologique est tempéré par le recours à l’étymologie (ou à des formes anciennes)<br />
dans les cas définis par les principes D à H, exactement ce que disait E. Jung cité par Nina<br />
Catach, 1978, p. 90 :<br />
« Toute orthographe phonologique dans son principe doit savoir faire des concessions,<br />
parfois très importantes, à une notation appropriée du système morphologique de la<br />
langue; c’est surtout le cas lorsque l’instabilité phonétique multiplie les variantes combinatoires,<br />
ou qu’il semble utile de conserver les caractères graphiques de la forme de base<br />
pour mieux faire sentir l’unité grammaticale ou lexicologique. » (La structure de<br />
l’orthographe française, sous la direction de Nina Catach, Actes du Colloque international<br />
CNRS de 1973, Klincksieck 1974, p. 110).<br />
Principe C : les mots sont « notés à l’état isolé »<br />
Le troisième principe est clair et peut demeurer sans changement :<br />
C.— Les mots seront notés à l’état isolé, sans tenir compte des modifications qu’ils peuvent subir<br />
dans les phrases au contact les uns des autres ou du fait de l’adjonction de s du pluriel.<br />
Ce troisième principe est surtout technique, mais il doit être énoncé avant toute définition des<br />
codes de graphie, même si l’ensemble doit y perdre en solennité ! Sur le fond, nous remarquons<br />
qu’il interdit l’élision et l’aphérèse, permises pourtant par les règles d’application. De plus, il est<br />
contourné par les règles grammaticales relatives aux mots grammaticaux, par exemple quand on<br />
énonce que l’article masculin eth devient er’ devant voyelle (er’àsou). Il n’appelle pas d’autre<br />
commentaire, surtout pour le gascon, car, en dehors de l’élision et parfois de l’aphérèse et du traitement<br />
particulier de certains mots grammaticaux, la plupart des régions conservent aux mots leur<br />
forme individuelle, quels que soient leurs voisins dans la phrase.<br />
Principes D et E : recherche de la « graphie englobante »<br />
Ces deux principes sont moins clairs que le précédent; et pour autant que je les lise et relise,<br />
ils me paraissent dire la même chose, surtout si l’on étudie les exemples qui les suivent : quelle différence<br />
entre le fait d’écrire jòc ce qui est prononcé [2%k, 2j%k, 0%k, 1%k] et celui d’écrire jorn ce qui<br />
est prononcé [2ur, 2un] ? Certes, dans le premier cas, c’est une lettre qui a plusieurs réalisations<br />
phonétiques, quand dans l’autre, ce sont deux lettres qui s’amuïssent l’une ou l’autre selon les parlers;<br />
mais la rédaction des deux principes n’en rend pas compte. Il semble donc plus simple de les<br />
grouper en un seul, que nous pourrions appeler celui de la graphie englobante :<br />
D.— On ne tiendra pas compte des variations<br />
de prononciation que subit chaque phonème<br />
d’origine. On choisira la forme de<br />
l’ancienne langue encore subsistante dans l’un<br />
quelconque de nos parlers.<br />
E.— Les mots ne seront pas représentés<br />
d’après un parler déterminé, mais d’après tous<br />
les parlers. La graphie devra être le support<br />
des diverses variantes de prononciation.<br />
D & E.— Lorsqu’un phonème (ou un<br />
groupe de phonèmes) d’origine subit, selon les<br />
parlers, des variations de prononciation, on<br />
choisira la forme écrite de l’ancienne langue<br />
qui représente directement la prononciation encore<br />
subsistante dans l’un quelconque de ces<br />
parlers. La graphie sera ainsi le support des<br />
diverses variantes de prononciation.