Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 72 Sociolinguistique du gascon<br />
sont allés voir le directeur} au lieu de « … qu’an anat véder … ». Quant aux dérives orthographiques<br />
de ce professeur, elles sont exposées p. 215. En revanche, si, selon l’idéologie occitaniste,<br />
il introduit dans la langue des formes archaïques dont n’use aucun locuteur naturel (exemplar pour<br />
exemplàri chez Palay), il prend heureusement quelques libertés à l’égard de cette idéologie pour<br />
respecter le caractère épicène de certains adjectifs gascons : « las opcions non son pas mei<br />
rentables, la dotacion orari » {les options ne sont plus rentables, la dotation horaire}, au lieu de<br />
rentablas, orària.<br />
Mais il ne s’agit là que d’exemples relevés au hasard d’articles ou de rencontres. L’inquiétude<br />
s’aggrave quand les fautes de langue reçoivent la caution d’institutions publiques, comme celles que<br />
l’on peut relever dans un dépliant de propagande « Réalisé par l’ONISEP Aquitaine avec le soutien<br />
du conseil Régional d’Aquitaine et du rectorat de l’Académie de Bordeaux » en novembre 2004. La<br />
chose est tellement “grosse” que j’y consacre l’Annexe IX à laquelle on voudra bien se reporter.<br />
On imagine alors ce qui peut en être dans une jeunesse qui ne sait à peu près rien de la vieille<br />
langue du pays. Et je ne suis pas, malheureusement, le seul à faire ce genre de constat :<br />
« […] les enseignants, dans leur immense majorité, n’ont pas la formation suffisante<br />
pour maîtriser pleinement les principes (linguistiques notamment) qu’ils sont chargés<br />
d’appliquer, […] ils sont réduits au rang d’exécutants. » (Florian Vernet, 1999).<br />
« Je suis hérissé par le vosautres [pour vos {vous}] de politesse qui s’est répandu<br />
parmi les maitres des Calandretas comme une carte professionnelle, et je frémis à l’idée<br />
que se répande le debacte [pour debat {débat}] que l’Université d’été de cette année vient<br />
d’inventer. » (Robert Lafont, 2001, p. 36).<br />
« … l’occitan à la faculté est une chose assez nouvelle. […] beaucoup de jeunes<br />
arrivent à l’université avec une petite idée de ce qu’est cette langue. Pour ceux qui la<br />
prennent en option, c’est une chance et une matière très originale. Ceux qui prennent le<br />
cursus principal changent parfois d’avis, mais pas forcément ceux qui ne connaissent pas<br />
bien la langue, non, ceux qui la savent déjà un peu. Par manque d’effectifs, des gens de<br />
niveaux différents se retrouvent ensemble, les uns à essayer de comprendre ce que disent<br />
les autres, les seconds à attendre que les premiers comprennent. Enseignement à une<br />
vitesse, la qualité de certains professeurs cache une sorte de baisse de qualité de langue.<br />
Cependant, après trois années de faculté, on retrouve des gens qui au CAPES ne parlent<br />
pas du tout la langue. […] Apparemment, il vaut mieux être très fort dans une matière à<br />
option que d’avoir une envie véritable d’enseigner la langue à celui qui veut l’apprendre. »<br />
(Vinçent Rivièra, 2002, p. 5).<br />
« Je connais des jeunes qui ont eu des maitres pour qui l’occitan était une langue<br />
apprise. Ces jeunes articulaient LaS brancas, laS nivols [au lieu de LaZ brancas, laZ<br />
nivols]. Je crois qu’on paie ici le prix de l’artificialité. » (Michel Audoyer, 2003, p. 444).<br />
Mais les concours de recrutement des enseignants n’y sont peut-être pas étrangers, comme le<br />
faisait remarquer un jeune professeur qui venait d’obtenir le CAPES d’« occitan » :<br />
« La connaissance de la langue n’est pas, me semble-t-il, appréciée et valorisée<br />
convenablement par les jurys. On donne trop d’importance à la littérature […]. Si c’est un<br />
honneur pour notre langue d’avoir une littérature, la langue vient en premier. J’ai discuté<br />
avec des gens qui ont passé le CAPES d’espagnol ou d’anglais et il m’a semblé que le<br />
CAPES d’occitan est encore plus littéraire que les autres CAPES de langue. […] Veut-on<br />
que les professeurs d’occitan enseignent notre langue comme le latin ? » (Éric Gonzalès,<br />
P.N.-P.G. n° 163/164, 7-10/1994, Courrier des lecteurs, p. 20).<br />
Et le rapport officiel du jury du CAPES d’occitan-langue d’oc de 2002, le dernier dont j’ai eu<br />
un écho, n’est pas fait pour nous rassurer :<br />
« Les correcteurs soulignent à nouveau le faible niveau, y compris linguistique, de