Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 231 Écriture du gascon<br />
“plaça”, “laissar”, “eu estàia” (lang. : èra), “eu aimerà”, et qui se prononcent : èg (ou èdj),<br />
pèr, shmin (avec nasale), piaç, iessà, ò etai, ò eimër.<br />
« Le problème est plus grave qu’il ne semble : les Auvergnats, Limousins et Marchois,<br />
quand ils écrivent, changent de dialecte en adoptant une norme sud-occitane. Il serait<br />
plus clair de le dire en toutes lettres, plutôt que d’essayer de faire croire que “chacun doit<br />
prononcer selon son parler coutumier” : cela ne se peut pas.<br />
« Il semble pourtant que le respect des règles essentielles de l’orthographe “normalisée”<br />
pourrait s’accompagner du respect des caractéristiques phonétiques de base des parlers<br />
nord-occitans. Cela ne plairait pas aux centralistes languedociens (et il y en a !), mais<br />
aiderait grandement à la renaissance occitane dans des pays où le culte de la norme sudiste<br />
l’a un peu entravée jusqu’ici. Il s’agit simplement de trouver le point d’équilibre entre<br />
l’affirmation de l’unité de la langue et le respect des dialectes » (Aicí e ara, n° 9, novembre<br />
1980, p. 60).<br />
Tout récemment, l’occitaniste provençal Alain Barthélémy-Vigouroux allait dans le même<br />
sens en présentant la réédition du Dictionnaire de base français-provençal du C.R.E.O.-Provence<br />
(Comité régional des enseignants d’occitan de Provence), dans Aquò d’Aquí n° 179, Novembre<br />
2004, p. 7 :<br />
« Les solutions les moins réalistes de la graphie classique la plus centralisée ont été<br />
atténuées en donnant aussi, soit la transcription phonétique (pour persègui, par exemple, ou<br />
pour les mots qui commencent par o prononcé ow, olive, ofrir, ocupar…) soit la forme<br />
écrite la plus proche de la prononciation (emé pour ambé), soit les deux formes (cafir/clafir),<br />
comme cela s’est fait aussi pour le e de soutien, maintenant enfin systémaquement<br />
noté entre crochets (facil[e]).<br />
« Souhaitons que la pratique orthographique continue sur ce bon chemin : il n’est pas<br />
évident pour tous les utilisateurs de dictionnaires, même un peu avisés de la graphie classique,<br />
que le suffixe -ion se dise majoritairement -ien, que le c de doctor doive se vocaliser<br />
en w, comme le b de obtenir, mais pas celui d’absolut, que le c de acte disparaisse mais<br />
que le x de exemple donne un son y, que espotir ait besoin d’un w invisible, et que le n<br />
simple de enuei nasalise pourtant la voyelle qui précède… »<br />
Et dans une démarche comparable à celle que je proposerai dans le prochain chapitre, ce critique<br />
use dans sa propre graphie de formes classiques qui s’écartent du “standard” occitaniste, généralement<br />
pour mieux serrer la prononciation provençale; par exemple :<br />
• refus du -z- intervocalique : centralisada pour centralizada;<br />
• consonnes muettes éliminées : dicionari, òugetiu, trata, adatat, pratica, restritivament, trascricien<br />
pour diccionari, objectiu, tracta, adaptat, practica, restrictivament, transcripcion;<br />
• voyelles muettes éliminées : correspondènci pour correspondència;<br />
• consonnes mises en accord avec la prononciation réelle : avans, òublige, eisèmple, espressiens,<br />
eisiston, òubragi pour abans, obligue, exemple, expressions, exist(iss)on; obratge;<br />
• voyelles mises en accord avec la prononciation réelle : edicien, trascricien; grafié, tipografié;<br />
òutìs, lòugierament, òubragi, òugetiu pour edicion, transcripcion; grafia, tipografia; otís, leugièrament,<br />
obratge, objectiu;<br />
• mots eux-mêmes choisis dans la langue parlée : em’, pajas, imagi, diversifiats pour amb, paginas,<br />
imatge, diversificats.<br />
Enfin, au plan lexicographique, il émet un vœu qui rejoint ma pratique, suggérée par l’éditeur,<br />
dans ma réédition 1998 du Dictionnaire béarnais ancien et moderne de Vastin Lespy, et que je mets<br />
encore en œuvre dans l’échantillon de dictionnaire orthographique en Annexe XXIII :<br />
« Souhaitons aussi de façon encore plus pressante que tout outil de cette diffusion et<br />
de cette qualité s’oblige à l’avenir à inclure les deux graphies de l’occitan moderne, la classique<br />
comme la mistralienne, en donnant certes la primauté à l’une ou l’autre selon le<br />
choix de l’auteur du livre, mais en reconnaissant que tout usager de la langue tant soit peu<br />
cultivé a besoin de se référer alternativement à l’une comme à l’autre. »