Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 319<br />
Écriture du gascon<br />
Le yod semi-consonne initial, postconsonantique ou intervocalique : y ou j ?<br />
Les normes de l’Escole Gastou Febus de 1900 puis de 1905 prévoyaient j là ou l’on dit [2] et<br />
y en Béarn qui dit [j], donc sans rechercher une “graphie englobante”. Pourtant, Palay avait donné<br />
sa préférence à la notation par j sur le y, sauf pour les mots censés n’exister que dans des endroits<br />
où la prononciation par [j] justifiait la graphie particulière y. Rappelant ce choix de Palay p. 254,<br />
j’ai finalement montré que j ne pouvait être graphie englobante couvrant les deux prononciations, et<br />
que les principes mêmes de la graphie classique voulaient j pour ce qui se dit [2] et y pour ce qui se<br />
dit [j]. Il en est a fortiori de même en graphie moderne, et il faut en rester aux règles de 1900-1905.<br />
/%/ devant e, i : g ou j ?<br />
VI – Les phonèmes consonantiques palatalisés<br />
La question ne semble pas avoir effleuré les auteurs des normes de l’Escole Gastou Febus..<br />
Chez Alibert, qui se réfère sans cesse à l’étymologie pour noter [s] par c ou ss, il n’en est plus<br />
question — ou presque — pour noter [2] ou [j] : ce sera g devant e et i, j partout ailleurs : getar <<br />
‘jactare’, màger < ‘major’, jòia < ‘gaudium’ etc. D’où des alternances dans les paradigmes verbaux<br />
: que mingi, que minjas, etc. Mais à la différence des Italiens, *Gèsus lui a paru trop audacieux,<br />
d’où Jèsus, et toutes sortes de mots dits savants, comme majestat opposé à màger, injeccion<br />
à getar etc. Ce qui aurait pu être simple finit encore par être compliqué !<br />
Palay, lui, a usé du g et du j devant e et i, mais il ne semble pas avoir eu de doctrine très sûre :<br />
« Devant e et i, […] dans la majorité des cas, nous avons respecté la tradition relativement<br />
à l’emploi du g étymologique; on ne devra pourtant pas être surpris si de nombreuses<br />
exceptions sont faites, pour plus de simplicité, à cette règle. » (Dic., p. XI)<br />
On ne voit pas où est la simplicité, quand on se donne une règle, puis quand on l’écarte lorsque<br />
l’occasion se présente, sans dire pourquoi; c’est encore plus flou que la référence d’Alibert au<br />
caractère “savant” du mot.<br />
Le principe de la graphie étant phonétique, j’estime donc que j doit être la règle pour [2], mais<br />
que dans le même esprit qui fait choisir entre c et ss selon l’étymologie, on lui substituera g lorsque<br />
l’étymologie en g est évidente, ou, en onomastique, lorsque la tradition l’a solidement établi : ‘gens’<br />
> la gen, lous gendarmes, lou generau, lous gentius…; ‘agere’ > agen, agéncie…; ‘regere’ > lou<br />
regen, lou regimen… Donc minja : que minji, que minjes… que minjam, que minjat(z)… Et bien<br />
sûr ‘Aginnum’ > Agen, mais aussi le Gers, quoique sans étymon certain en G-.<br />
Écrire /*/ : nh ou gn ?<br />
Parlant d’Arnaud de Salette, M. Grosclaude (1983, p. 297) a cru pouvoir dire : « contrairement<br />
à la tradition constante de l’écrit occitan et béarnais, il graphie le son de “n mouillé” avec le<br />
digraphe français GN et non nh. ». C’était ignorer notamment la Charte de Herrère de 1278 qu’il<br />
citait pourtant quatre pages plus haut et dont on reparlera bientôt.<br />
Il est exact, pourtant, que nh a été très employé par l’ancienne langue gasconne et béarnaise.<br />
Cela ne posait pas de problème quand le son [h] était noté par le f étymologique latin (fite {borne,<br />
limite} prononcé hite), alors que seuls quelques mots savants avaient gardé la prononciation latine<br />
en f (familhe, fe {foi}, foo {for}…). Donc [enhur·na] {enfourner} s’écrivait enforna(r), sans confusion<br />
possible. Mais aujourd’hui, on est obligé d’écrire le h distinct du f : hemne {femme}, mais