Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 224 Écriture du gascon<br />
Ces règles de lecture ne concernent que les graphèmes o, ò, a « dans les terminaisons », r final,<br />
v, ish ou sh, ch, lh et nh. Sont notamment omis ó, n final et th, généralement final; et dans une<br />
lettre publiée au Courrier des lecteurs du n° 89 de Mars-Avril 1982 mais restée sans suite, Éric<br />
Gonzalès regrettait l’absence de j valant /2/ ou /j/ selon les lieux, de u « accolé à une voyelle formant<br />
diphtongue » et valant /*/, de -ia se réduisant parfois à /i/ et du mot òc toujours prononcé /o/.<br />
– ce qui est dit de a « dans les terminaisons » concerne en fait le a posttonique, qui se rencontre<br />
dans le corps des mots composites comme les adverbes en -ment et les composés par soudure<br />
verbe + nom comme abusacaishaus; inversement, le a des proclitiques atones comme les articles<br />
era et la ou la préposition enta, bien qu’en « terminaison », n’est jamais « posttonique » et justiciable<br />
des prononciations indiquées; la prononciation [u] que l’on rencontre en Médoc est ignorée,<br />
alors que L’application… de 1952 (p. 144 ci-dessus et Annexe XIII) en faisait déjà mention;<br />
– dire que « r final est toujours muet » est faux et marque les lacunes des auteurs qui semblent<br />
n’avoir jamais rencontré que cor, lo car, la tor, lo tòr, l’abòr, esquèr, eslur etc. {il court, le char, la<br />
tour, le gel, l’automne, gauche, avalanche}; certes, la graphie classique que je propose note ces<br />
mots par -rr (voir p. 276), mais pas celle de l’I.E.O. enseignée par l’École;<br />
– relève d’un “à peu près” regrettable le fait de dire du v qu’« entre deux voyelles, on le prononce<br />
tantôt B, tantôt comme le W anglais. Ainsi suivant les régions, on dira : que cantabi ou que<br />
cantawi. » Cela donne l’impression que ce n’est qu’une affaire de « régions », alors que dans la<br />
vaste portion du domaine gascon où certains v intervocaliques se prononcent [w], un grand nombre<br />
d’autres se prononcent [.] comme dans alavetz, devarar, etc. {alors, descendre} (voir p. 253);<br />
– enfin, il est faux de dire que « CH se prononce TCH » : non seulement certains ch de la graphie<br />
I.E.O. se prononcent partout [#] (chivau, chapèu… {cheval, chapeau}) au point que nombre<br />
d’auteurs les notent aujourd’hui par sh, mais encore ce qui est [0] en certaines régions est [tj] dans<br />
d’autres et [#] simple dans une troisième série de régions (voir p. 263).<br />
Certes, tout cela devient bien compliqué et on risque d’effrayer l’usager; mais est-ce bien<br />
honnête de cacher ainsi la difficulté, si on en est conscient ? Et si on l’ignore, cela dénote alors une<br />
méconnaissance de la phonologie du gascon dans son ensemble, ce qui est bien triste pour la langue<br />
qu’on est censé enseigner avec la compétence voulue.<br />
Mais peu importe, comme en 1967, toute difficulté est écartée par un encadré qui barre toute<br />
la page :<br />
En résumé, l’ORTHOGRAPHE NORMALISÉE NE CHANGE EN RIEN VOTRE<br />
PRONONCIAION HABITUELLE.<br />
Heureux temps — en 1972 — où Robert Lafont pouvait écrire, après avoir fait passer<br />
l’épreuve d’occitan du Baccalauréat à Mende (1973, p. 38) :<br />
« ces interrogations étaient de bien curieux dialogues. Venaient vers nous, enseignants<br />
qui n’étions qu’auditeurs attentifs, des jeunes filles et des jeunes garçons capables<br />
de tout dire dans leur langue, qu’ils appelaient cependant “patois”. On n’avait qu’à les<br />
écouter, […]. Le dialectologue enregistrait en marge d’une feuille de notes tel trait phonétique<br />
mal connu. Le linguiste ou l’écrivain reconnaissaient un tour syntaxique d’une parfaite<br />
intelligence. […] Il fallait “ noter” cette matière humaine brute. Noter une langue que<br />
l’examiné connaissait quelquefois plus spontanément que l’examinateur. »<br />
D’étonnantes justifications du choix orthographique<br />
Les justifications du “pourquoi” de cette orthographe ne sont pas moins approximatives :