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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 67 Sociolinguistique du gascon<br />

« Il dit : “Pourquoi je dis non ? Parce que j’ai un tas de demandes, de milliers de<br />

choses à faire et que je choisirai l’indispensable, parce que nous ne devons pas gaspiller<br />

l’argent public, etc. Alors je dis d’abord non à tout et je ferai ce à quoi je ne pourrai pas<br />

échapper.”<br />

« Et nous pouvons être sûrs que tant qu’il pourra y échapper, il le fera. »<br />

Dans le même sens, en une journée de réflexion sur Pyrénées-Atlantiques au XXI e siècle<br />

initiée par le Conseil général que présidait F. Bayrou, Maurice Jeantet, président de l’<strong>Institut</strong><br />

d’administration des entreprises, disait : « Pourquoi aussi ne pas apprendre l’espagnol dès l’école<br />

primaire ? L’occitan et le basque c’est bien, mais pour la veillée ». (Éclair-Pyrénées, 26 juin 1996).<br />

Une école alibi ?<br />

La reconquête du terrain perdu par la langue n’est donc pas le souci premier des populations;<br />

mais pire encore, on a observé que bien des parents qui envoient leurs enfants dans les Calandretas<br />

le font en raison des méthodes d’enseignement et des petits effectifs, beaucoup plus que par<br />

attachement à la langue “régionale”; il en est probablement de même pour les quelques classes<br />

bilingues instituées dans l’enseignement public. Cela explique par exemple ce constat fait par J.<br />

Salles-Loustau (1995) :<br />

« si l’on veut bien s’attarder un instant sur les profils des catégories socio<br />

professionnelles des parents des enfants qui fréquentent les calendretas, à qui il faut<br />

reconnaître un mouvement précurseur déterminant en matière de maintien de l’occitan :<br />

ingénieurs, cadres supérieurs, professions libérales, pour la plupart d’entre eux. »<br />

Le chargé de mission pour la culture occitane en tirait aussitôt la conclusion optimiste :<br />

« Et c’est grâce à ces catégories sociales là que l’occitan est en train de regagner ses<br />

lettres de noblesse. »<br />

Dans le même sens, Serge Javaloyès (1999), co-président de la Confédération Calandreta<br />

depuis 1989, célébrait les 20 ans de ces écoles en constatant :<br />

« En 1993 [sic; peut-être une coquille pour 1999 ?], la langue est encore une<br />

motivation mais c’est la dialectique “langue/méthode pédagogique” qui fait venir de<br />

nouvelles personnes et tout particulièrement des gens des villes. Calandreta devient,<br />

finalement, un mouvement urbain, un mouvement du changement social. » 13 .<br />

De quoi d’ailleurs se demander si le « changement social » est bien le but des Calandretas !<br />

En tout cas, une enquête récente sur d’anciens élèves de la Calandreta de la Còsta pavada de<br />

Toulouse montre que dès le passage au collège, ces enfants ont tendance à abandonner l’oc, à la<br />

fois comme par rupture avec ce qui leur fut en quelque sorte imposé par leurs parents et par désir de<br />

suivre la majorité qui trouve cela ringard, vieux jeu… (Chantal Dompmartin-Normand, 2002). Au<br />

demeurant, selon cet auteur, la plupart des élèves des Calandretas en milieu urbain n’utilisent guère<br />

l’occitan hors de la salle de classe, ce qui n’a pas de quoi surprendre…<br />

Même constat dans une enquête sur 17 anciens de la Calandreta de Béziers, aujourd’hui<br />

étudiants en université, mais dont « un seul s’est orienté vers une spécialisation en occitan » :<br />

« ce qui ne manquera pas d’en étonner plus d’un, c’est le désintérêt majoritaire pour<br />

la mouvance militante occitaniste et une désaffection pour la création culturelle occitane<br />

actuelle. Et plusieurs qualifient même de “patois” l’occitan hérité […]. Ces ex-<br />

“calandrons” se souviennent que c’était bien essentiellement le français qu’ils parlaient<br />

13 On observera combien ce court texte, traduit mot à mot du gascon, vérifie l’observation de Kremnitz (1992)<br />

rapportée plus haut, p. 64 « Le lecteur a parfois l’impression de se trouver en présence d’un texte pensé en français et<br />

plus ou moins traduit en occitan. »

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