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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 133 Écriture du gascon<br />

Tout cela, pour la théorie; mais concrètement, quelle fut la graphie de Sarrieu ? Il en a changé<br />

au cours des ans, comme fruit de sa réflexion et de ses progrès dans la connaissance de la langue.<br />

On peut du moins se référer aux Règles principales de l’orthographe gasconne des Morceaux choisis<br />

publié en 1977 (pp. 63-65) : en fait, un phonétisme rigoureux avec les graphèmes du français<br />

pris très généralement pour leur valeur française : /// noté dj; /1/, ts; /0/, tch. C’est particulièrement<br />

sensible dans la notation de l’article masculin qui est etch, edj ou et suivant le début du mot qui<br />

suit. Le ç est utilisé. Les finales féminines sont en -o au singulier, mais en -es au pluriel [es],<br />

comme en aranais “classique” (voir p. 159) : mountanho, mountanhes. Et le /e/ atone est e, mais<br />

tonique, é : enténe.<br />

Font exception : /&/, lh; /'/, nh; mais la mouillure qui disparait au pluriel n’y est donc pas<br />

notée : biélh, biéls; -[sjun], cioun; les diphtongues, notées ai, èi, ei etc. au, èu, eu, ôu… On<br />

remarque l’accent circonflexe, qui se sépare du òu de Mistral et de l’E.G.F.; mais il s’agit là<br />

semble-t-il d’une façon d’éviter ò adopté par la graphie classique; on lit donc bôsc, liô (lune) etc.<br />

Donc une graphie de filiation mistralienne, mais qui se veut distincte de celle de l’Escole<br />

Gastou Febus, sans raisons évidentes sur plusieurs points. Mais tout cela n’est plus que de l’histoire<br />

ancienne…<br />

IV – Philadelphe de Gerde (vers 1930)<br />

Après l’échappée classique de Palay et hormis Girard établi à Toulouse, les <strong>Gascon</strong>s étaient<br />

plutôt réticents devant le mouvement incarné par l’Escòla occitana (cf. p. 128) qui privilégiait<br />

grandement le languedocien. L’exception, ce sera Philadelphe de Gerde (1871-1952), qui portait le<br />

deuil de la défaite de Muret en 1213, … et n’appréciait pas trop le monde de l’Escole Gastou<br />

Febus. Mais semblant ignorer l’expérience gasconne de Girard (cf. p. 129), Philadelphe va se<br />

renseigner auprès de Perbosc pour essayer d’en appliquer les règles à son dialecte bigourdan. Ce<br />

n’est pas facile cependant; le 24 janvier 1930, elle écrit à l’abbé Salvat (Salvat, 1963, p. 184) :<br />

« Ce misérable <strong>Gascon</strong> a mauvaise tête : quand on croit le tenir, il vous échappe ! et<br />

il marche sur toutes les règles à grandes enjambées. Ainsi, pour la r de l’infinitif, après<br />

l’avoir prise dans ma seconde copie, je l’ai lâchée dans ma troisième comme vous le<br />

verrez. Et j’en ai du regret ! Mais vraiment, pensez-vous que je la puisse prendre quand je<br />

dois dire : yurà-n (en jurer), emparà-u (l’étayer), trobà-u (le trouver), aperà-d ome<br />

(appeler l’homme) ? […]<br />

« Et pour le v donc, car nous ne pouvons pas dire comme vous, Languedociens, que<br />

le v se prononce toujours b… puisqu’il se prononce tantôt b tantôt w… Je sens que si je<br />

fais un quatrième manuscrit, je reprendrai ce w, gardant le v” pour remplacer le b<br />

seulement; et je dirai : cantaua, parlaua, disèua, etc. Qu’en pensez-vous ? ».<br />

Aussi son recueil Eds crids (1930) s’ouvre-t-il successivement par un Avertissement, des<br />

Règles pour la lecture occitane et une Note relative à la graphie du présent livre. L’Avertissement<br />

est un exposé historique et linguistique sur la Langue d’oc, le Félibrige et la nouvelle orientation<br />

“occitane”, avec son système orthographique; il est co-signé par tous les membres d’un « comité<br />

d’édition » présidé par la poétesse et comptant le Pr. Joseph Anglade, Armand Praviel, l’éditeur<br />

Édouard Privat et l’abbé Salvat.<br />

Le résultat de cette adaptation délicate, c’est quelque chose d’intermédiaire entre la graphie<br />

fébusienne et celle de Perbosc-Estieu. Voici par exemple en vis-à-vis la version originale de la<br />

première strophe de Bernadeta (1913) et sa version “classique” de la 2 nde édition (1934) :

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