Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 227 Écriture du gascon<br />
– la prononciation /o/ du a posttonique disparaitra curieusement à partir du n° 102 de Mai-<br />
Juin 1984, pour réapparaitre avec le n° 166 de Janvier-Février 1995, tandis que disparait la prononciation<br />
/a/ : « […] ne se prononce jamais franchement [a], mais [œ], [o] faible (selon l’accent particulier<br />
de votre région). ».<br />
– le ch ne sera plus mentionné à partir du n° 102 de Mai-Juin 1984;<br />
– le ó n’apparaitra que très tardivement, à partir du n° 166 de Janvier-Février 1995.<br />
Enfin, tout rappel des règles de lecture a disparu depuis le n° 180 de Mai-Juin 1997. Ainsi,<br />
alors que la langue se parle de moins en moins et que les références orales disparaissent, tout se<br />
passe donc comme si les dirigeants de Per noste estimaient que la graphie classique est lue sans<br />
problème par tous les lecteurs de la revue. On en a encore confirmation dans le fait que le nouveau<br />
dictionnaire de G. Narioo et autres n’y consacre pas une ligne (cf. p. 186). Cela dénote un décrochage<br />
total de la réalité de l’enseignement, qu’explique peut-être le fait qu’il n’y a plus guère<br />
d’enseignants actifs parmi ces dirigeants. Mais les limites des hommes n’expliquent pas tout.<br />
II – Les défauts congénitaux de la graphie classique de l’I.E.O.<br />
Le système classique porte en effet en lui-même bien des raisons de son échec. La plus grave,<br />
et irréparable, c’est l’erreur historique qui a cru voir dans les graphies médiévales la bonne façon<br />
d’écrire une langue réputée n’avoir guère changée depuis des siècles; la seconde, c’est l’illusion que<br />
ce qui était bon pour le languedocien le serait pour les autres langues d’oc, et en particulier le gascon,<br />
même si ces langues étaient mal connues des Languedociens, Alibert en tête.<br />
L’erreur de linguistique diachronique<br />
« En tant que linguistique d’une langue particulière, la linguistique occitane fait<br />
usage des principes et des concepts qui lui sont fournis par la linguistique générale. Si donc<br />
nous tombons dans la littérature scientifique concernant l’occitan sur un énoncé qui<br />
contredit ces principes, nous devrons le tenir pour hautement suspect. Par exemple, P. Bec<br />
écrit qu’à partir du 16e siècle “la langue se maintient [...] sans évoluer sensiblement” (La<br />
Langue occitane, 1995, 89), mais la linguistique générale indique que l’évolution est un<br />
universel. Si toutes les langues évoluent, la langue occitane ne peut avoir la propriété merveilleuse<br />
de se maintenir. » (J.-P. Chambon, 2003, p. 3).<br />
Or la “renaissance” occitane du XIX e s. a été d’abord un enfant du Romantisme qui, découvrant<br />
la poésie lyrique des Troubadours, voulut y voir la “Langue d’oc” éternelle dans sa pureté et<br />
même son unité originelle qu’il faudrait rétablir. Et des “érudits” de terrain entendirent écrire désormais<br />
la langue moderne dans la “graphie des Troubadours”, et rendre ainsi à la langue “sa dignité”.<br />
Les études linguistiques conduites depuis ont montré l’erreur de ces prémisses, comme le résumait<br />
le Pr. H. Gavel (1942, p. 4), alors Président d’honneur de la S.E.O. (cf. p. 141) :<br />
« D’autre part, (bien que quelques-uns semblent croire le contraire), la prononciation<br />
de la langue d’oc a notablement changé, dans l’ensemble du Midi, depuis le temps de la<br />
grande floraison lyrique. Si les grands troubadours du XII e siècle revenaient parmi nous il<br />
leur faudrait certainement un certain temps, plusieurs jours au moins, quelques semaines<br />
(suivant les régions) pour arriver à la compréhension aisée de la conversation courante.<br />
C’est là encore un point qu’il ne faut pas perdre de vue. »<br />
Concrètement, nous avons l’exemple du long processus qui, du XIII e au XVI e ou XVII e s., en<br />
oc comme en oïl, a fait passer les o fermés romans à /u/, entrainant l’apparition simultanée de graphies<br />
en ou dans les deux ensembles romans de la France (pour le gascon, voir p. 103 et <strong>Lafitte</strong>,<br />
2003-3); ou encore de la prononciation du a étymologique posttonique demeurée en /a/ dans l’est