Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 264 Écriture du gascon<br />
Lorsque cette correspondance n’est pas assuréeƒ 30 , et en dehors du cas visé à l’alinéa suivant,<br />
chacune de ces prononciations est notée par son graphème propre : [tj] par th (athèu {là}; cf. p.<br />
263), [0] par tx (matx {match}), et [#] par x (xivau {cheval}; cf. p. 265).<br />
-g note ce qui, en Haut-Comminges, Aran et Couserans se prononce [0] ou [#] en finale et dérive<br />
en -[j]- : hag {hêtre}.<br />
La chuintante /'/ : un seul graphème pour /'/ pangascon<br />
Outre sa réalisation en variante de /0/ étudiée ci-dessus, il existe un /#/ identique en tous lieux,<br />
comme provenant en général de x, cs, ps latins, mais aussi de s simple chuinté ou d’un emprunt au<br />
français. Comme plus haut pour /tj/ ou /0/ principalement issus de -ll, voici d’abord ce qu’en disent<br />
L’application… (A) et Darrigrand (D) :<br />
« Le son du CH français provenant du sc ou « 25 – Le son “ch” (Français : vache) est<br />
du x latins sera représenté par ish: eishami, eis- noté ISH lorsqu’il provient d’un SC ou X lahorbar,<br />
eishordar, peish, maishèra, teish, créistins.her, naish, baishar.<br />
« Au début des mots, il est noté “SH”.<br />
« Quand ce son provient de c ou de s, on ré- « Très souvent, ce sh initial provient d’un<br />
tablira les graphies par c ou s: saliva, seringa, “s” latin chuinté (Voir la prononciation castil-<br />
serment, sèis, sishanta, suau, sord, civada, lane du “S”);<br />
suc. »<br />
« dans les mots empruntés au Français il est<br />
noté “CH”. »<br />
Certes, certains normalisateurs occitanistes avaient tenté de faire disparaitre la notation spéciale<br />
de ce /#/, mais ils ont échoué (p. 163). Mais il y a une tendance lourde de l’occitanisme à éliminer<br />
de l’écrit tout ce qui n’est pas habituel en languedocien, et la solution “officielle” de A était<br />
d’ignorer le [#] issu du chuintement de [s] étymologique, pour lequel le tableau de la p. 260 montre<br />
des variantes en [s] dans le domaine gascon lui-même : [#i*la] ou [si*la] < ‘sibilare’ {siffler}. Mais<br />
les usagers n’ont pas suivi et tenu à noter ce phonème [#] très gascon par son graphème propre;<br />
cette solution a été consacrée par D; faute d’avoir imaginé un graphème “englobant” [#] et [s], un<br />
polymorphisme graphique s’est donc établi sur le polymorphisme phonétique, et je ne vois pas<br />
d’autre issue.<br />
Mais pourquoi donc D conserve-t-il pour [#] le ch des emprunts au français, qu’on ne prononce<br />
nulle part [0] ou [tj] ? Outre qu’il n’est pas évident pour le scripteur ordinaire que [#i'!au]<br />
vient du français “cheval” (trois phonèmes modifiés sur cinq), cela mène à des lectures aberrantes<br />
par tous ceux qui apprennent une langue qu’ils n’entendent plus, puisque ch sera prononcé en un<br />
même lieu [#] dans chivau et [tj] dans chavèca {chouette}. La seule solution logique, c’est d’user du<br />
graphème général prévu pour [#]; ce fut le choix de X. Ravier (cf. p. 149), c’est aussi celui des Aranais<br />
: cornishon, maishant, maishina, pioshar, shagrinar, shivau etc. (Vergés Bartau, 1991).<br />
Mais quel doit être ce graphème ?<br />
30 En fait, cette correspondance sera souvent ignorée, faute d’une vue d’ensemble de la prononciation gasconne, même<br />
chez les lexicographes : ainsi, pour empachar {empêcher} par exemple, on trouve *empaishar chez ceux qui ignorent la<br />
prononciation en [ì], et *empathar chez ceux qui prononcent [tj]; pour de nombreuses citations d’auteurs et de dictionnaires<br />
qui témoignent de ces hésitations, cf. <strong>Lafitte</strong>, 1995-2.