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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 333<br />

Écriture du gascon<br />

de ces graphies, somme toute peu nombreuses, montre vite que faute d’une réflexion globale sur la<br />

question, cet usage du tréma est anarchique et renseigne assez mal sur les prononciations réelles.<br />

Par exemple, il donne lagüe, laguë et laüe{lagune}, la variante en -uë étant inutile et peu rationnelle<br />

comme on le verra bientôt; oëne {vanneau}, localisé en Gascogne maritime, se dit ['wœnœ] selon<br />

Arnaudin qui l’écrit ouene, comme ouelh {œil}, donc en 2 syllabes et non 3 comme le supposerait<br />

le tréma de oëne; Palay aurait donc dû le noter oene, comme oelh {œil}. De même, pour les quelque<br />

80 mots ou formes en oui, ouì ou ouï, la coexistence, pour les mêmes mots, de variantes en oui ou<br />

ouì et d’autres en ouï fait douter de la diérèse ou de la synérèse.<br />

Il convient donc de s’appuyer sur la distinction entre voyelles “fortes” et voyelles “faibles”,<br />

seules ces dernières pouvant perdre leur valeur vocalique et former diphtongue avec une autre<br />

voyelle (cf. pp. 291 à 293).<br />

Les voyelles fortes, demeurent toujours des voyelles : a, e, é, è en première ou seconde position,<br />

ou également, sauf devant i, et ë et o en seconde position seulement; elles se prononcent toujours<br />

en diérèse, sans qu’il soit besoin d’un tréma : grâa {grainer}, que grâë {qu’il graine}, aerma<br />

{dépérir}, averâè {noisetier}, aorte {=}, que grâe {il graine}, aoulhe {brebis}, crea {créer}, que<br />

créë {qu’il crée}, hêère {fenaison, fenil}, geode {géode}, cadêe {chaine}, geougrafë {géographe},<br />

enfeouda {inféoder} (Palay : enfëoudà, avec tréma superflu, heureusement absent dans feoudalitàt,<br />

feoudàu), cououpera {coopérer}, la soûe {la sienne}.<br />

Les voyelles faibles sont les seules à pouvoir former diphtongue; ce sont u en première ou<br />

seconde position, i et o en première seulement, et ou devant i; avec une place à part pour y qui ne<br />

peut que former diphtongue, en première ou seconde position :<br />

• en finale (le -s éventuel n’étant pas pris en compte), u, i et ou toniques, suivies de e, ë ou i<br />

(dans ce cas, notés ù, ì, où), forment diérèse sans besoin de tréma : cadûe {chacune}, qu’ayue {il<br />

met sous le joug}, qu’envië {qu’il envoie}, vesîe {voisine}; qu’envìi {j’envoie}, que sìi {que je<br />

sois}, que mîi {que je mène}; que coue {elle couve}, qu’avouë {qu’il avoue}, que soûi {je sonne};<br />

mais gràcie ['grasjo] {grâce}, que càmbii {je change} [ke 'kambji], que hàrgoui {je forge} [ke 'hargwi].<br />

• ailleurs, elles forment normalement diphtongue, dite “ascendante” si la faible est la première<br />

: luét {lueur}; youga {jouer}; espia {regarder}; vielh {vieux}; baloar {boulevard}, quoan<br />

{quand, combien}, boè {bouvier}, yoén {jeune}…; couic ! {cri aigu d’un animal} [kwik]; “descendante”<br />

si la faible est la seconde : loucau {local}, que beu {il boit}, vòute {voute}, aygue {eau},<br />

beroy {joli}…; si les deux sont faibles, c’est la première qui reste voyelle : nuyt {nuit} [ny"t], cuyt<br />

{cuit} [cy"t], bùu {bœuf} [by*], formes des Landes, xiula {siffler} [#i*'la], pouyrit {pourri}<br />

[pu"'rit], arrouy {rouge} [a'rru"]; que sentiy {je sentis} [sen'ti"].<br />

Mais si dans ces cas il y a diérèse, le tréma sera mis sur u, i, voyelles faibles pour inhiber leur<br />

tendance à se muer en semi-voyelle pour former diphtongue : flaüte {flute}, arrêüt {qui a le dos<br />

fort}, gremilhoûüt {grumeleux}, düeliste {duelliste}, süicidë; et des mots savants comme dïacidë.<br />

Pour o, la question ne se pose pas, puisqu’en diérèse on note ou : pouème.<br />

Dans le groupe ouï, le tréma est sur i dans selon un usage qu’il parait difficile de contrarier :<br />

ouïde {ouïe en Barège-Lavedan} (ouìdo chez Palay et chez Massourre, 2003, p. 451 : [u'i*%]). De<br />

même, par habitude et pour pour éviter une lecture française, on notera le tréma sur ï dans aïrous<br />

{irascible}, ateïsmë {athéisme}, païs {pays} etc.

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