Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Jean <strong>Lafitte</strong> 148 Écriture du gascon<br />
Et l’« épuration de la langue » ?<br />
Mais pour les occitanistes, « la graphie est plus que la graphie », selon le titre d’un article de<br />
P. Sauzet (1990). Et nous avons vu qu’en post-scriptum, L’application… estimait nécessaire d’épurer<br />
la « langue littéraire ». Or du fait de la rédaction un peu désordonnée de ce document, c’est juste<br />
avant l’énoncé des règles détaillées de graphie qu’est placé un long paragraphe, correspondant des<br />
développements de la première « règle générale » d’épuration de la langue littéraire dans le<br />
document de 1950. Il débute en effet de la même façon, et ne laisse aucun doute sur sa portée : « en<br />
présence de divergences résultant d’accidents linguistiques divers, on choisira, autant que possible,<br />
pour l’usage littéraire, les formes les plus conformes à l’évolution normale de la langue et les mieux<br />
conservées ». Et c’est là que se situent 33 règles de choix des formes, dont par exemple celles qui<br />
feront notamment préférer uelh à gúelh, et inversement guaire à uaire, hlor, hromiga et hrut à<br />
eslor, lor, arromiga, romiga, rut ou hurut, esquiròu à esquirò et deu, peu à do, po (cf. p. 244).<br />
Bien sûr, on peut discuter de ce qui peut être regardé comme « l’évolution normale de la langue<br />
», chaque normalisateur ayant tendance à considérer son parler propre comme normal…; et on<br />
verra p. 159 que les Aranais ont préféré l’esquirò banni à l’esquiròu “normal”… Mais La réforme…<br />
n’a pas mélangé les genres et bien distingué la « normalisation linguistique » de la<br />
« normalisation graphique », ce que beaucoup, hélas, ne savent pas faire…<br />
17 – La graphie classique “modernisée” par Jean Séguy et son “école”<br />
D’ordinaire, l’Atlas linguistique de la Gascogne (ALG) note les mots gascons selon un codage<br />
particulier de leur prononciation. Mais dans les tomes IV à VI (1966 à 1973), on trouve des notations<br />
en graphie classique de la main de Jean Séguy; en particulier, dans le tome IV, les mots que<br />
les informateurs avaient refusés comme n’étant pas de leur vocabulaire (Séguy, 1966, pp. 10 et 12).<br />
Le volume V est de Jacques Allières. Et l’on peut y associer des écrits de Xavier Ravier, qui fut<br />
selon Séguy le meilleur enquêteur qu’on pouvait espérer (ib. p. 5). Il est donc intéressant de relever<br />
les écarts des notations de ces éminents spécialistes du gascon par rapport à ce que l’on considère<br />
comme la norme de l’I.E.O.<br />
Les cartes de l’ALG seront citées par leur n° entre parenthèses, étant entendu que les n°s<br />
1093 à 1608 sont dans le volume IV, 1609 à 2065 dans le V et 2066 à 2531 dans le VI; les références<br />
aux fascicules accessoires sont notées ainsi : pour le fascicule 2 du volume V, V-2; et pour le<br />
fascicule complémentaire du volume VI, VI-C. Les ouvrages de Xavier Ravier étudiés ici sont<br />
avant tout les Poèmes chantés des Pyrénées gasconnes (Ravier et Séguy, 1959-60 et 1978, cité R.I),<br />
un article de Via Domitia sur “Le poète chansonnier Marcellin Castéran et son poème Mayourau de<br />
Nistos” (cité R.II), et accessoirement Le récit mythologique en Haute-Bigorre (Ravier, 1986, cité<br />
R.III) dont la plupart des morceaux de poèmes sont déjà en R.I. (les récits mythologiques y sont<br />
d’une graphie plus “standard”). En outre, je me réfère le cas échéant à la transcription phonétique<br />
de certains Poèmes chantés du fascicule 2 de 1960, qui n’a pas été reprise dans l’édition de 1978.<br />
Mais nous observerons d’emblée que ces écrits sont des œuvres énormes dans un domaine qui<br />
demande une attention sans relâche; il n’est donc pas étonnant de trouver ici ou là des incohérences,<br />
voire des fautes de frappe pures et simples, comme lorsque la notation phonétique déteint sur la<br />
graphie, avec eskaudar {ébouillanter} (1393), quand à arrajou {versant au soleil} manque l’accent<br />
grave sur le o (1103) ou à pregaria {prière} sur le premier a (1517), quand /u/ est rendu par ou<br />
dans pèd dou hoec {coin du feu} (1292), ou encore quand on lit cul-sec {avare} (1260) et cuu-pelèir