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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 204 Écriture du gascon<br />

Il n’est pas rare non plus qu’on trouve jusque dans des comptes-rendus d’activités scolaires<br />

des mots attachés à des traditions écrits en graphie moderne comme l’esperouquère (enlèvement de<br />

la spathe du maïs effectué à la main dans des réunions conviviales entre voisins); alors que l’École<br />

est censée s’en tenir à la graphie classique…<br />

Et quand les journaux de Pau invitent les “amoureux” à s’envoyer des messages pour la St<br />

Valentin 2004, sur 192 messages publiés, 190 sont en français, un en italien et un seul en béarnais,<br />

en graphie moderne; reprenant le refrain de la célèbre chanson Aqueres mountagnes, la dame qui<br />

l’envoie l’a adapté, témoignant d’une connaissance active de la langue : Si canti, qué canti, canti<br />

pas per jou, canti per mi amic [{mon ami}, au lieu du ma ’migue {mon amie} de la chanson], qui<br />

ey auprès de jou. Même chose pour les « Meilleurs vœux 2005 » : sur 229 messages, un seul en<br />

béarnais, en graphie moderne; un autre en français s’achève par Adichatz {au revoir}, qui mêle ch<br />

moderne des Félibres et -tz classique.<br />

Toujours dans la presse, celle du 22 décembre 2003, le compte-rendu avec photo d’une séance<br />

de dédicace à Arzacq d’un ouvrage intitulé Lo noste Bearn {Notre Béarn}. Son auteur, un ancien<br />

instituteur, y a réuni les monographies des communes du Béarn en donnant pour chacune, le cas<br />

échéant, les dictons qui s’y rapportaient. Or malgré la graphie classique du titre, c’est en graphie<br />

moderne qu’il a écrit ses textes béarnais. Et voici comment le correspondant local voit la chose :<br />

« … Hubert Dutech est venu dédicacer son livre “Lo noste Bearn” (oc). […] Tout à<br />

l’intérieur y est délicat, mesuré, et retrace in extenso le véritable béarnais, tel qu’il s’est<br />

transmis au fil des ans par les proverbes ou maximes. Les anciens y retrouveront leurs souvenirs,<br />

les jeunes sauront que leurs racines proviennent d’une langue réellement minoritaire<br />

dont beaucoup ont essayé d’en détourner l’essence même.<br />

« “Lou nouste Bearn” par ses textes est ses superbes photos ouvre une porte vers<br />

l’évasion dans un bien beau pays (de 387 communes). Lou nouste »<br />

J’ai mis en italique les mots qui me paraissent essentiels dans l’analyse de ce texte : Le titre<br />

en graphie classique est repéré comme « oc », ce qui dans l’esprit du journaliste signifie probablement<br />

“occitan”, en tout cas non-béarnais; car il est non seulement opposé au « véritable béarnais »<br />

de l’« intérieur de l’ouvrage », mais encore à sa transcription dans cette langue, quand le journaliste<br />

le nomme « “Lou nouste Bearn” », où les deux occurrences du phonème /u/ sont notées par ou. Et il<br />

insiste pour dire que ce beau pays est « Lou nouste » {le nôtre}. Au passage, il a laissé entendre que<br />

la graphie classique est un détournement de l’essence même de la langue.<br />

On peut ne pas être d’accord avec cette façon de voir les choses, mais c’est un bon témoignage<br />

de ce que pense un grand nombre de locuteurs naturels du béarnais, à qui l’on ne donne pas<br />

souvent la parole.<br />

Mais le comble est peut-être atteint avec l’annonce de l’accession au grade de docteur èsethnomusicologie<br />

de Jean-Jacques Casteret, par ailleurs président de l’<strong>Institut</strong> occitan de Billère (cf.<br />

p. 80) : dans un encart central de huit pages des quotidiens palois du 7 janvier 2005, l’évènement<br />

donne lieu à une grande photo sur la moitié de la “une” et à un article occupant, avec une autre<br />

grande photo, les trois quarts des deux pages centrales; or que lit-on en gros titre ? « Ô cantayres »<br />

et « Le beau pays des cantayres », le mot cantayre {chanteur} s’affichant insolemment en graphie<br />

moderne, au lieu de cantaire de la classique, pourtant seule reconnue par l’<strong>Institut</strong>. Et l’article nous<br />

apprend que M. Casteret est lui-même cantayre du groupe Balaguère {vent du sud} (Balaguèra en<br />

graphie classique)…

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