Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon
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Jean <strong>Lafitte</strong> 156 Écriture du gascon<br />
Le grand principe : on n’écrit que ce qui se prononce<br />
Entrant dans le vif du sujet, Sarrail donne la première règle : « En général toute lettre qui ne<br />
se prononce pas ne doit pas s’écrire ». On le sait bien, c’est certainement ce qui sépare le plus la<br />
graphie moderne de la classique. Or à ce sujet, Sarrail se livre à une réflexion sur les consonnes<br />
étymologiques finales qui, amuïes dans le mot simple, réapparaissent en dérivation et que Palay<br />
note entre parenthèses : poun(t), car(n)… Sarrail interprète cela comme une « liberté » laissée au<br />
scripteur. Mais j’ai montré p. 136 que jamais Palay n’avait laissé cela à la fantaisie des auteurs :<br />
pour lui comme pour l’E.G.F. depuis 1900, on n’écrit que ce qui s’entend.<br />
L’apport de Sarrail<br />
Sarrail consacre ensuite 22 pages dans chaque langue à décrire la graphie de l’E.G.F., dont les<br />
règles de 1905 tenaient en moitié moins; c’est dire que le texte est aéré, et aussi fortement glosé. Je<br />
n’en retiens que ce qui me parait nouveau par rapport à 1905, fût-ce déjà adopté par Bouzet ou<br />
Palay.<br />
Pour distinguer les deux types de -e, Sarrail préconise de systématiser la pratique de Palay<br />
entérinée par la grammaire de Courriades (p. 142 ci-dessus), mais dont j’ai signalé les lacunes.<br />
Des innovations de Palay, Sarrail entérine également l’accentuation de ou, soit où, soit oû,<br />
l’élimination de l’h muet; et bien sûr, il garde le ç introduit par Bouzet et utilisé par Palay. Mais il<br />
n’apporte lui-même rien qui distingue le -n vélaire du -n dental ni le e légèrement nasal du é pur<br />
tonique, comme il l’était en 1900. Au demeurant, p. 37, il semble confondre le -n vélaire subsistant<br />
dans les parlers du Gers pour l’équivalent de capoû, marroû (marron) et le -n dental des mots<br />
communs « chin, maynadin, roun, que badoun ».<br />
Il n’accepte pas le concept de graphie englobante qui avait guidé Palay dans la préférence<br />
pour le j sur l’y, le j pouvant se réaliser en [2] ou [j], pas l’y. Il en fait une affaire de choix personnel<br />
« par habitude » (p. 55), tout comme de la liberté de noter par -o la finale féminine atone car « les<br />
Armagnaquais et les montagnards […] tiennent à cet o comme à la prunelle de leurs yeux. » (p. 73).<br />
Or cette liberté aboutit à introduire dans le système une quantité considérable de mots finissant par<br />
-o atone, alors que le -o est traité comme tonique par ailleurs; on arrive à ce que belo soit [!e'lo]<br />
pour “vélo” en général, et ['!elo] pour “voile” en Armagnac (p. 39). Curieuse conception d’un<br />
système; en fait, laxisme bienveillant qui sacrifie la langue aux fantaisies de petits auteurs locaux.<br />
Pourtant, même si sa formulation pratique est plutôt confuse, Sarrail admet en plusieurs cas<br />
que les variantes de prononciation ne justifient pas toujours des graphèmes différents; ainsi pour ch<br />
réalisé en [0] ou [tj] (pp. 51-53); mais il ne semble pas faire la différence entre le ch de bacha (qui<br />
ne sera nulle part [0] ou [tj]) et celui de chaca qui peut l’être; de même, en préférant la graphie -t de<br />
bèt (cèu de Pau), il n’imagine pas que bèth puisse convenir partout (pp. 59, 61).<br />
Il donne par contre, p. 53, d’utiles indications sur le sort de -ts final dans les dérivés en une<br />
remarque importante pour la bonne intelligence des graphies -tz-, -ts-, -ds- et -dz- du Palay , comme<br />
nous le verrons plus loin (p. 327).<br />
Sarrail détaille aussi les réalisations de x, graphème “savant” à réalisations multiples<br />
fortement marquées par la prononciation. Il donne ensuite les prononciations réelles et tout en<br />
exprimant sa préférence pour une graphie qui reflèterait mieux celles-ci, en reste au x uniforme de<br />
la décision de 1905. J’y reviendrai p. 330.