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Thèse J. Lafitte - Tome I - Institut Béarnais Gascon

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Jean <strong>Lafitte</strong> 330<br />

Écriture du gascon<br />

qu’on renonçait à lui faire noter le son /#/, n’avait sa place que dans des mots étrangers, pour rendre<br />

une prononciation elle-même étrangère. Or le gascon accueillait de plus en plus de mots français,<br />

surtout pour dire les idées abstraites et les techniques modernes, et le x y était très présent, notamment<br />

par le préfixe latin ex-. C’est ce qu’exprime la référence que les rédacteurs des normes de<br />

1905 font à Lespy, dans sa Grammaire et son Dictionnaire; or le mot « fixe » cité est ignoré de la<br />

langue ancienne, et il vient du français avec sa prononciation française.<br />

Mais ces rédacteurs sont bien conscients eux aussi de ce que la prononciation populaire, fidèle<br />

à la phonologie autochtone, n’est pas celle-là, que Lespy, professeur au Lycée de Pau, devait considérer<br />

comme supérieure. Renonçant à analyser le problème et à le traiter véritablement, ils<br />

tournent le dos au principe d’une notation généralement phonétique et même à celui de la conservation<br />

de la langue autochtone, et adoptent la graphie française en recourant à l’esquive que les tenants<br />

de la graphie classique pratiqueront plus tard tant et plus : on écrit tous pareil, et chacun prononce<br />

comme il en a l’habitude. Nous remarquons au passage que le recours à la « graphie<br />

englobante » n’est pas une invention d’Alibert…<br />

Mais revenons au problème : on cite quatre mots béarnais, examina, exercìci, exi, bexa, puis<br />

les diverses prononciations du x de ces mots : cs, gz, ts, tz, dz. Cela n’est pas sérieux ! Déjà, « tz »,<br />

sourde + sonore, n’existe pas en pratique, c’est [1] ou [+].<br />

Et Lespy (Dictionnaire), repris par les normes de 1905, était dans l’erreur en donnant [ks] du<br />

français « fixe » comme prononciation du x de examina, exercìci, dont on a vu, p. 285, que c’est<br />

[+]. Il se trompe encore plus pour exi et exilh; en effet, il ne donne lui même, à sa place alphabétique,<br />

que « Exir », avec majuscule suivie de minuscules, selon sa façon conventionnelle d’écrire<br />

les mots de l’ancienne langue qui n’existent plus dans la langue moderne. Or dans l’ancien béarnais,<br />

exir ne se prononçait pas [e'ksi[r]], mais [e'#i[r]], comme eixir en catalan moderne, ou eishir que J.<br />

Allières a entendu dans les parties les plus conservatrices des vallées pyrénéennes, du Lavedan au<br />

Couserans (ALG V, 1895 et 1896). De même pour exilh, comme la graphie eshilhade {exilée}<br />

l’atteste à l’entrée EXILHA, graphie dont le sh est chez Lespy un hapax orthographique.<br />

On voit par là que par faute d’analyse, les “normalisateurs” de 1905 sont passés à côté du<br />

problème et ont adopté une lettre sans en définir la valeur, tout en passant pour préoccupés de<br />

l’unité graphique par dessus la variété des prononciations : or celle-ci ne varie pas selon les parlers<br />

gascons, mais selon les voisinages phonétiques ou l’étymologie, comme nous l’avons vu pp. 283-<br />

285. Mais il faut rendre ici hommage à André Sarrail (cf. p. 156) qui avait fort bien vu la chose : p.<br />

61, après avoir décrit la prononciation identique à la française dans ses trois configurations, il<br />

ajoute :<br />

« b) Cette prononciation est la savante. Mais, en réalité, elle se réduit souvent à :<br />

« – s devant une consonne : Ex. : tèste, estèrne.<br />

« – dz, devant une voyelle : Ex. : edzamen, edzémple.<br />

« – t, devant ce ou ci : Ex. : etcès, etcita.<br />

« Le dictionnaire, lui-même, donne: edsamen, Nabarrens, esclusioû, escusa, espousicioû,<br />

escouminya, etc.<br />

« Il serait très facile de mettre un peu d’ordre dans cette mélasse et de supprimer l’x,<br />

comme l’ont fait les Provençaux et les Italiens. Nous n’aurions qu’à le remplacer par s, t, et<br />

dz, ainsi que nous venons de le dire et qu’il se prononce le plus souvent.<br />

« Mais la Commission de 1905 a pensé qu’en gardant le x prononcé à la fantaisie de<br />

chaque région, la graphie y gagnerait en simplicité. »

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