Histoire de l'internationalisme

L'ÉPOQUE NAPOLÉONIENNE
et qu'il pouvait en conséquence plus facilement créer une organisation
européenne stable. Il était lui-même très intéressé à l'établissement
d'une paix durable, notamment parce qu'il ne souhaitait pas que les
chefs mihtaires acquissent trop d'influence. A ce propos, on a parlé
d'un ,, Napoléon antimiUtariste ". En un certain sens, ce paradoxe
exprime une partie de la réalité : personnellement l'empereur voulait
avant tout jouer le rôle du grand homme d'Etat constructeur. Il désirait
montrer que son talent miUtaire ne représentait qu'un aspect de son
génie. En même temps, il voyait dans les chefs mihtaires des rivaux
éventuels prêts à lui disputer le pouvoir. Aussi avait-il toujours soin
de les subordonner à l'autorité civile.^" Mais à elles seules, de telles
conceptions ne suffisent pas à rendre un homme ,, antimihtariste ",
dans la véritable acception pacifiste du terme.
Il est tout à fait vrai que Napoléon était exempt de préjugés
nationaux, et le caractère universel de son génie et de ses objectifs
explique pourquoi également des écrivains non-français ont pu aussi
longtemps nourrir l'illusion c[ue lui, il pourrait créer ime Europe har-
monieuse et stable. Mais rien dans son œuvre ne semble indiquer qu'il
ait jamais sérieusement désiré réaliser ses propres idées internationalistes.
Lorsqu'il prétend à Sainte-Hélène qu'il avait tenu ces projets secrets
pour empêcher les intrigues, cela ne paraît pas très convaincant. Leur
soudaine pubhcation après de longues et sanglantes campagnes ne
devait en tout cas pas contribuer à accroître la certitude qu'ils étaient
présentés dans un esprit de sincérité.
COSMOPOLITISME ET
CONSCIENCE NATIONALE
§ 2. ALLEMAGNE :
Le régime napoléonien n'eut pas de conséquences directes importantes
pour l'évolution de l'internationalisme. Mais son influence indirecte fut
grande, car il contribua à modifier le caractère des relations entre les
nations. Dans ce domaine, c'est le résultat négatif du régime qui fut
" Voir A. AtiLARD dans La Révolution Frftn(,'aiso XLIV, p. 502 (C'oini)t