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SPINOZA

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« LE TRAITÉ THÉOLOGICO-POLITIQUE » 139<br />

et l'accuse ouvertement de plagiat. Rapidement, il décèle en.<br />

Spinoza l'initiateur et le tentateur, et son but profond sinon<br />

avoué sera non pas de le réfuter, mais de le rendre inoffensif.<br />

Aussi les huit premiers chapitres du premier livre de l'Histoire<br />

critique du Vieux Testament offrent-ils un parallélisme curieux<br />

avec les chapitres VII-X du Tractatus.<br />

Pour Richard Simon comme pour Spinoza, la seule méthode<br />

légitime d'exégèse est la méthode critique fondée sur l'expérience<br />

et la raison. Toutes les ressources de l'érudition philologique et<br />

historique sont nécessaires pour retrouver ce sens littéral qui<br />

seul intéresse notre positif oratorien; mais souvent le bon sens<br />

le plus élémentaire lui suffit pour isoler un certain nombre de<br />

faits troublants. Déjà son cinquième chapitre porte un titre à<br />

scandale : « Preuves des additions et autres changements qui<br />

ont été faits dans l'Écriture et en particulier dans le Pentateuque.<br />

Moïse ne peut être l'auteur de tout ce qui est dans les livres qui<br />

lui ont été attribués (1). » Et le voilà qui cite les six arguments<br />

d'Aben Ezra. Moïse, fût-il prophète, n'a pu parler des rois<br />

d'Israël et décrire sa propre mort. Il n'a pu parler de Dan et<br />

d'Hébron et constater la disparition des Cananéens. Dans la<br />

Genèse, allant plus loin que Spinoza et préludant aux recherches<br />

d'Astruc, il remarque un désordre, des redites et des contradic<br />

tions qu'on ne peut imputer à Moïse. Enfin plus délicat encore,<br />

la diversité des styles qui se révèle dans le Pentateuque, lui<br />

impose de croire à une diversité d'auteurs (2). Jusque-là Richard<br />

Simon ne semble pas dépasser l'audace des Jésuites de la Renais<br />

sance, d'un Bonfrerius par exemple, et il est significatif que les<br />

objections personnelles de Spinoza ne soient pas reprises et que<br />

son nom ne soit jamais prononcé. C'est dans l'explication et<br />

non pas seulement l'acceptation des faits, que Richard Simon<br />

allait donner sa mesure. Pas un seul instant il n'essaie comme<br />

Huet de préserver l'intangibilité du texte : ces livres sacrés ont<br />

eu le sort des choses humaines. « Comme les hommes ont été les<br />

dépositaires des livres sacrés et que les premiers originaux ont<br />

modérer, vraiment supérieur dans la critique de toute sorte de livres mais<br />

particulièrement de ceux qui traitent de matières ecclésiastiques, Richard<br />

Simon, vint chez le libraire Michallet et là, faisant tout haut l'éloge de<br />

l'ouvrage, il déclare qu'il avait l'intention de l'abréger. Mais la vraie pensée<br />

de Simon était bien différente. Il ne se proposait rien moins que d'inter<br />

poler, refondre, désarticuler mon livre, de l'accommoder à son dessein et<br />

de le faire entièrement le sien propre » (Mémoires latins, Hachette, 1853,<br />

p. 178). Le malheur est que la Demonslratio evangelica fut publiée un an<br />

après l'interdiction de la Critique du Vieux Testament.<br />

(1) Histoire critique du Vieux Testament (Rotterdam, Reinier Leers, 1685,<br />

p. 31 sq.).<br />

(2) Ibid., p. 39.

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