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SPINOZA

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« LE TRAITÉ THÉOLOGICO-POLITIQUE » 187<br />

l'on voyait dans les Provinces Unies le vieil universitaire d'Utrecht<br />

Voetius défendre un formalisme conservateur, contre les allé<br />

gories plus ou moins cartésiennes professées à Leyde par Coc-<br />

cejus. L'ami de Spinoza, Louis Meyer,<br />

outre encore les thèses<br />

•coccéiennes dans sa Philosophie interprète de l'Écriture (1). Mais<br />

une secte nouvelle est apparue, pourchassée et par là mystérieuse,<br />

celle des sociniens. Allant plus loin que le schisme arien, les<br />

adeptes de Fauste Sozzini ne croient plus à la divinité du Christ :<br />

les prophéties ne sont plus que des allégories, de véritables<br />

fictions poétiques sans valeur littérale et sans force probante.<br />

Le sage Grotius lui-même, dont le chris-<br />

De Veritate religionis<br />

iianae (2) fera encore l'émerveillement de Bayle et de Leibniz,<br />

se laisse tenter par les arguments du socinien Crellius qu'il<br />

■connaît en Hollande vers 1631, quatre ans avant de venir à<br />

Paris comme ambassadeur de la reine Christine de Suède (3).<br />

Bien inquiétante est sa doctrine de la prophétie. Sous prétexte<br />

de réaliser la paix des Églises, Grotius reconnaît dans l'Écriture,<br />

i, côté des livres inspirés afflatu divino, de simples livres de piété,<br />

pio animi motu,<br />

pour lesquels aucune intervention divine n'est<br />

nécessaire : dictari a spiritu sancto nihil opus (4). Quant aux<br />

prophéties sur le Christ,<br />

rique acceptable,<br />

elles ont un double sens : un sens histo<br />

mais limité strictement au monde contempo<br />

rain du prophète, et un sens allégorique qui n'a aucune valeur<br />

d'argument. En France même, l'ambiguïté règne; mais les<br />

•opinions larges de Grotius déclenchent une offensive. Albert<br />

Monod a exhumé le Moyse dévoilé du protestant Girard des<br />

Bergeries (5), invraisemblable recueil de toutes les figures de<br />

l'Ancien Testament où de puériles analogies tiennent lieu de<br />

preuves : Samson tuant le lion annonce Jésus tuant la mort;<br />

le silencieux travail des constructeurs du Temple préfigure l'édi<br />

fication pacifique de l'Église de Dieu. Neuf ans plus tard, en<br />

1679, l'avocat parisien Louis Ferrand renouvelle l'interpréta<br />

tion de deux prophéties messianiques, celle de Jacob dans la<br />

Genèse et celle de Daniel (6) : son érudition historique, non<br />

exempte d'arguties,<br />

fera grosse impression sur les esprits du<br />

temps et convaincra aussi bien Huet que Bossuet. La même<br />

(1) Philosophia S. Scripturae inlerpres, exercilalio paradoxa (1663).<br />

(2) Elzévir, 1636, in-12.<br />

(3) Cf. Pradier-Fodéré, Essai biographique et historique sur Grotius et<br />

son temps (en tête d'une traduction du De jure belli ac pacis, Paris, Guillau-<br />

min 1867), et Bossuet, Dissertation sur la doctrine et la critique de Grotius<br />

/in ouvres complètes, Paris, Coignard, 1747, t. II, p. 367).<br />

(4) Volum pro pace ecclesiastica (article De canon, script., t. III, p. 672).<br />

(5) Genève, 1670 (cf. De Pascal à Chateaubriand, Alcan, 1916, p. 63).<br />

(6) Réflexions sur la religion chrétienne (Paris, Pralard, 1679,2 vol. in-12).

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