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SPINOZA

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76 <strong>SPINOZA</strong> ET LA PENSÉE FRANÇAISE<br />

successifs est déjà ancienne; «le grand homme de notre siècle<br />

qui a cru après plusieurs autres que les versets où l'on trouve de<br />

nouveaux noms ont été insérés dans les livres de Moïse par<br />

Esdras »,<br />

c'est évidemment Episcopius. Un tel escamotage est<br />

encore plus scandaleux, lorsque Leclerc justifie la fameuse objec<br />

tion « au-delà du Jourdain » en prouvant contre Huet que le<br />

mot hébreu beheber n'a jamais dans la Bible le sens de « en<br />

deçà (1) », ou lorsque, allant plus loin que Spinoza, il trouve dans<br />

la distinction des deux mots roe et nabi, qui signifient tous deux<br />

prophète, un argument de plus contre la mosaïcité du Pentateuque<br />

(2). Mais au milieu du lacis des critiques qui visent surtout<br />

Richard Simon, Leclerc retrouve Spinoza dans l'attribution<br />

aventurée du Pentateuque à Esdras : « Un auteur moderne qui a<br />

quelquefois réussi dans ses conjectures mais qui mêle une infi<br />

nité d'impiétés parmi le peu de bonnes choses que l'on trouve<br />

dans ses ouvrages, soutient que cet auteur (du Pentateuque<br />

évidemment) est Esdras qui selon lui n'y a pu mettre la dernière<br />

main (3). » Lorsqu'on copie le Tractatus, le silence est permis;<br />

lorsqu'on le critique, le courage revient. Spinoza évidemment<br />

s'est aventuré; malgré la ressemblance de style de tous les écrits<br />

du Vieux Testament, il est difficile de conclure à un seul auteur<br />

« comme a fait Spinoza qui n'entendait rien dans la critique (4) >.<br />

Il y a surtout ce fameux Pentateuque samaritain presque iden<br />

tique au texte hébreu et qui est antérieur à Esdras. Leclerc<br />

avance alors son hypothèse : ;; Le Pentateuque a été composé<br />

en un temps auquel les anciens caractères étaient encore plus<br />

connus aux Juifs que les nouveaux qu'ils prirent dans la cap<br />

tivité et par une personne qui n'était suspecte ni aux Samari<br />

tains ni aux Juifs (5) ». Ce rédacteur ne peut être que ce sacri<br />

ficateur israélite cité au IIe Iivredesi?o!s(6),qui vintdeBabylone<br />

après la dix-huitième année du règne de Josias pour instruire<br />

les nouveaux habitants de la Palestine. Une telle ingéniosité<br />

aurait ravi Spinoza qui, de lui-même, reconnaissait la fragilité<br />

de son attribution de tant de livres à Esdras; mais il aurait souri<br />

des ingratitudes de son disciple. En effet, que restait-il dès lors<br />

(1) Sentimens... (p. 1191.<br />

(2) Ibid., p. 117 : Nabi se disait autrefois roe, donc il y a anachronisme<br />

chaque fois que Moïse est appelé nabi ou tel autre dans le Pentaleuque<br />

(Aaron dans Exode, VII, 1) (cf. Tractatus, Appuhn, t. II, p. 194).<br />

(.'! Ibid., p. 127 (cf. Appuhn, t. II, p. 197 : « Je tiens (Esdras) pour le<br />

véritable auteur aussi longtemps qu'on ne m'en aura pas fait connaître<br />

un autre avec plus de certitude »).<br />

(4t Sentimens de quelques ihèoloqiens... (p. 153).<br />

(5) Ibid., p. 128-129.<br />

(6) Rois (11° livre, chap. 17).

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