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SPINOZA

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218 <strong>SPINOZA</strong> ET LA PENSÉE FRANÇAISE<br />

n'est pas théologien d'Edward Synge n'est traduite qu'en 1694<br />

en Hollande (1), et demeure assez orthodoxe. Pierre Coste nous<br />

procure le Christianisme raisonnable de Locke en 1696 (2). Coi-<br />

lins nous atteint en 1714 avec son Discours sur la liberté de<br />

penser (3). Les plus violents ou les plus explicites ne nous par<br />

viennent qu'après la mort de Louis XIV, Wollaston en 1726,<br />

Mandeville en 1723, Warburton en 1742. Les Lettres philoso<br />

phiques de Voltaire en 1734 révéleront souvent leur nom pour<br />

la première fois au public français. Une conclusion s'impose :<br />

de 1670 à 1700, le déisme anglais n'a pu de façon notable contri<br />

buer à former le déisme français. Leur développement n'est<br />

pas successif, mais parallèle. Le seul problème qui se pose est<br />

celui de leurs sources communes. M. Léon Roth l'a en partie<br />

résolu pour l'Angleterre (4), en montrant le respect de Hobbes<br />

et de Toland pour Spinoza, l'indulgence de Locke, de Shaftes<br />

bury et même de Clarke. Mais Lanson va trop loin en affirmant<br />

que « la philosophie est née en France au xvne siècle (5) ». Ni<br />

le libertinage en détresse, ni le cartésianisme dont on utilise<br />

beaucoup moins la méthode que les arguments métaphysiques,<br />

ne permettent de prévoir l'essor de l'esprit philosophique, qui<br />

souvent s'établira en réaction contre eux.<br />

Le Tractatus au contraire, en se plaçant d'emblée au-dessus<br />

des sectes, par sa critique solide de la révélation, tout autant<br />

que par sa répugnance pour l'argument facile de la fraude<br />

pieuse, a pu en France comme en Angleterre développer l'idée<br />

d'un christianisme élargi et raisonnable. Certes, M. Lanson a<br />

raison de montrer combien d'éléments intellectuels, du cartésia<br />

nisme au gassendisme, et d'événements politiques comme la<br />

Révocation de l'Édit de Nantes, le colbertisme ou les échecs<br />

de la fin du règne, préparaient les esprits à l'accepter. Mais il<br />

— faut bien avouer que le Tractatus est avant 1700 à l'heure<br />

où le Dictionnaire de Bayle n'a pas encore révélé dans le dédale<br />

de ses notes sa prodigieuse puissance de critique et de dissolu<br />

— tion le seul ouvrage doctrinal capable de fonder en raison<br />

la philosophie nouvelle. Ce sont ses thèmes essentiels, souvent<br />

déformés et avilis, qui préfigurent la religion du siècle des lumières<br />

et marquent déjà le dédoublement classique de la religion vol-<br />

tairienne. Nous reconnaîtrons aisément le souvenir de l'analyse<br />

(I) Amsterdam, Brunel, 1694.<br />

(2) Amsterdam, Wetstein, 1696.<br />

(3) Bruxelles, 1714 (traduit par Scheurleer et Rousset).<br />

(4) Spinoza, Descaries and Malmonides (Oxford, 1924).<br />

(5) R. C. C. (24 décembre 1908, p. 359).

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