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SPINOZA

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310 <strong>SPINOZA</strong> ET LA PENSÉE FRANÇAISE<br />

car encore qu'il soit vrai de dire que Dieu s'est manifesté nue-<br />

ment et immédiatement à son esprit et que par lui Dieu s'est<br />

fait connaître aux hommes, ce n'a point été par voie de révéla<br />

tion mais par celle d'union en sorte que Jésus-Christ a pu dire :<br />

Pater et ego unum sumus. Son humanité a été véritablement<br />

la voie par laquelle Dieu s'est manifesté aux hommes, mais<br />

elle est encore la vérité et la vie en tant qu'unie à la divinité :<br />

c'est pourquoi la pensée de Spinoza est encore plus absurde<br />

qu'elle n'est impie (1). » La conception spinoziste de la pro<br />

phétie appelle d'autres réponses.<br />

Boulainviller condamne d'abord l'esprit général, l'entreprise<br />

elle-même qu'il juge « superbe et téméraire (2) ». Mais il ne<br />

peut admettre la prétention de Spinoza qui tend à rationaliser<br />

la prophétie : celle-ci n'est pas une prédication morale et le<br />

prophète est autre chose qu'un sage inspiré; Dieu parle effec<br />

tivement par sa voix : « Si cela n'était pas ainsi, Jésus-Christ<br />

n'aurait employé que de bonnes raisons, il ne se serait pas<br />

autorisé par la voie des miracles (3). » Lorsque Spinoza montre<br />

que les cérémonies du culte ont pour origine un but politique,<br />

soit que Moïse tienne à organiser théocratiquement le gouver<br />

nement des Juifs, soit que les sacrements chrétiens manifestent<br />

des signes d'union que les chrétiens eux-mêmes « sont incapables<br />

de sanctifier (4) », Boulainviller le reprend avec véhémence :<br />

« Comment Spinoza peut-il donc faire pour détruire la nécessité<br />

des cérémonies et leur sainteté puisque c'est Dieu même qui<br />

les a prescrites, qui les a réglées, déterminées (5)? » « ... C'est<br />

ignorer les premiers principes de notre culte. Cette proposition<br />

pleine d'une impiété que l'on ne peut trop détester mérite plus<br />

d'indignation que de réponse et doit servir d'exemple aux<br />

funestes conséquences de la doctrine de cet athée (6). » Enfin<br />

l'interprétation spinoziste du miracle porte au comble sa gêne.<br />

Il est obligé d'admettre « l'abus des idées vulgaires touchant<br />

les miracles... Tout esprit raisonnable sera indigné de l'opinion<br />

qui ferait consister la principale gloire de la divinité dans le<br />

dérèglement des lois naturelles ». (7) Mais au lieu de se tirer<br />

d'embarras en empruntant à Malebranche la thèse des causes<br />

(1) Ms. B. N., 77 (cf. Simon, p. 465).<br />

(2) Ms. B. N., 102 et v» (cf. Simon, p. 469; d. 98 v" : « Sa manière de<br />

traiter avec une liberté que l'on peut nommer téméraire des matières aussi<br />

hautes »).<br />

(3) Ibid., 101.<br />

(4) Appuhn, t. II, p. 115.<br />

(5) Ms. B. N., 192 v».<br />

(6) Ms. B. N., 200.<br />

(7) Ibid., 249 v».

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