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SPINOZA

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« LE TRAITÉ THÉOLOGICO-POLITIQUE » 19Î<br />

tude de ce qu'ils percevaient seulement par l'imagination et noa<br />

par des principes certains de la pensée (1) ».<br />

Or,<br />

cette certitude n'est nullement fondée sur l'entendement :<br />

le sage Salomon n'est pas prophète, au contraire de l'inculte<br />

servante d'Abraham, Agar. Le prophète n'a nullement plus de<br />

science que les hommes de son temps, ne connaît parhé-<br />

pas les<br />

lies et croit que le rapport du diamètre d'un cercle à la circon<br />

férence est de trois à un. Chaque prophète conserve son tempé<br />

rament : l'un, mélancolique, annonce les ruines, l'autre, gai,<br />

prédit la miséricorde; le berger Amos conserve son style grossier,<br />

le courtisan Isaïe ses raffinements d'expression. La révélation<br />

divine s'adapte à la personnalité même de l'interprète. Quelle<br />

est donc la mesure de cette certitude? D'abord, une imagination<br />

vive que les esprits supérieurs par l'entendement refrènent ordi<br />

nairement (2); puis un signe qui distingue le faux du vrai pro<br />

phète par d'indiscutables miracles ou du moins crée une suffi<br />

sante conviction intérieure. Mais surtout cette certitude dépend<br />

du contenu même de la révélation : tous les prophètes n'ont<br />

d'inclination que pour le juste et le bon. Certes, ce n'est pas une<br />

certitude mathématique, mais une certitude morale (3). La mission<br />

des prophètes n'est pas d'augmenter la science des hommes, de<br />

percer les secrets de la nature, ni même de nous renseigner sur<br />

la nature de Dieu (4); ce ne sont ni des philosophes ni des savants<br />

et nous n'avons aucune confiance à leur accorder dans ces-<br />

domaines (5). Mais ils nous apprennent la voie droite, les règles<br />

d'une vie bonne et pieuse, les prescriptions de la charité, la<br />

conformité des mœurs avec la loi de Dieu.<br />

Spinoza ne nie pas l'évidente valeur de cette certitude morale.<br />

L'Écriture s'adresse à un peuple de primitifs, à des âmes simples;<br />

à ce peuple, à ces âmes, il faut des mandements précis, des.<br />

exigences, des ordres, et non de subtils raisonnements ou les<br />

enchaînements rigoureux de la géométrie. Pour le vulgaire, il<br />

ne s'agit pas de raisonner sa foi, mais de la vivre;<br />

si le salut<br />

dépendait de l'intelligence ou de la science, combien peu d'hommesseraient<br />

sauvés. Heureusement, il suffit d'obéir. L'Écriture n'est<br />

qu'« une leçon d'obéissance (6) ». « Dieu n'exige des hommes<br />

par les prophètes d'autre connaissance de lui-même que celle<br />

(1) Appuhn, t. II,<br />

2) Ibid., p. 41.<br />

3 Ibid., p. 45.<br />

p. 40.<br />

(4) « Les Israélites n'ont à peu près rien su de Dieu » (ibid., p. 58).<br />

(5) « Il s'en faut de qu'on beaucoup doive tirer d'eux la connaissance de*<br />

choses naturelles et spirituelles » (ibid., p. 62).<br />

(6) Appuhn, t. II, p. 270.

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