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SPINOZA

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<strong>SPINOZA</strong> ET LE PROTESTANTISME FRANÇAIS 71<br />

choquant que de voir assimiler les hommes à des animaux-<br />

machines. Or, que faut-il opposer à Spinoza qui voit une parfaite<br />

adéquation entre les desseins divins et l'enchaînement infini<br />

des causes? L'accuser d'hypocrisie, le soupçonner d'appeler néces<br />

sité ce qui n'est que le hasard d'Épicure (1)? La Placette est<br />

refoulé sur ses dernières positions, l'affirmation du sens intime.<br />

Spinoza nous prétend déterminés invinciblement en « tout; ce<br />

que nous nions, c'est que cet ordre de causes d'un côté nous déter<br />

mine toujours, et de l'autre que toutes les fois qu'elles le font,<br />

elles le fassent invinciblement (2) ». Il y<br />

a d'abord des actes sans<br />

aucune détermination physique ou morale qui prouvent une<br />

véritable liberté d'indifférence, et sur ce point La Placette se<br />

réfère à Descartes. La causalité morale n'a pas de caractère<br />

impérieux : je suis mieux assis que debout, mais je peux cependant<br />

demeurer debout (3). La causalité physique est impérieuse, mais<br />

je puis résister à la peur, au danger,<br />

par l'attrait de la gloire<br />

ou le sens du devoir. La Placette ne voit pas qu'il retombe sur<br />

un autre ordre de nécessité et s'en tire par une naïve pétition<br />

de principe : « Si les causes morales nous déterminaient toujours,<br />

les morales seraient inutiles ». (4) Mais tous ces arguments n'ont<br />

pas la valeur d'un fait dont la réalité s'impose à nous : « Nous<br />

sentons notre liberté et cela doit nous suffire pour nous con<br />

vaincre que nous sommes libres (5) ». Ce sentiment intime n'est<br />

pas une illusion : il nous démontre notre liberté avec autant<br />

d'efficience que notre existence même. Il y a en nous une « indif<br />

férence active « », un pouvoir de nous déterminer nous-mêmes<br />

comme il nous plaît ». (6) Que Spinoza ne nous oppose pas sa<br />

pierre qui tombe; sa pierre ne pense pas; lorsque l'homme tombe,<br />

il sait fort bien que cette chute est<br />

entraîné dans un gouffre,<br />

involontaire. L'image de la pierre est aussi ridicule que celle de<br />

la girouette donnée par Bayle (7) et qui ignorera toujours qu'il<br />

a des vents. A la primauté du déterminisme valable dans le<br />

y<br />

monde physique, La Placette oppose la primauté de la cons<br />

cience dans le monde de l'intelligence. La liberté dès lors n'est<br />

plus un préjugé, une erreur de jugement,<br />

mais la preuve de l'hété<br />

rogénéité foncière de la matière et de l'esprit. « Il y a en moi<br />

« (1) Je suis persuadé que ce qu'Êpicure appelait hasard et ce que Spi<br />

noza appelle nécessité est la même chose » (Éclaircissements... p. 317).<br />

(2) Ibid., p. 319.<br />

3 Ibid., p. 320.<br />

(4) Ibid., p. 322.<br />

(5) Titre du chapitre IX, p. 324.<br />

(6 Ibid., p. 327.<br />

(7) Réponse aux questions d'un provincial (t. II, p. 764).

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