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SPINOZA

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« LE TRAITÉ THÉOLOGICO-POLITIQUE » 167<br />

à son tour «non pas à l'indépendance seulement comme elle tâchait<br />

de s'en persuader, mais à la souveraineté même (1) ». N'allons pas<br />

faire de Descartes un hypocrite, même s'il sut pratiquer la vertu<br />

de prudence; il fut un pratiquant scrupuleux et fit une mort<br />

édifiante. Mais chez ce pur intellectuel, dont la foi était un accord<br />

de sentiment et de routine, l'intérêt profond de la vie était ailleurs.<br />

Son acceptation totale et aveugle d'un Dieu qui transcende la<br />

raison humaine et qui peut à son gré promulguer des miracles<br />

est en contradiction flagrante avec sa méthode. « Spinoza fera<br />

de la religion un succédané de la philosophie à l'usage des simples.<br />

Mais une telle idée n'a pas effleuré l'esprit de Descartes (2). »<br />

Mais l'équivoque née de son « séparatisme » ne lui survivra pas<br />

longtemps. Malebranche, plus cartésien que son maître, va le<br />

premier appliquer au miracle la méthode rationnelle. Et comme<br />

le remarque M. Blondel : « Peut-être, en assimilant la raison au<br />

Verbe divin d'une façon tout à fait antipathique à l'arrière-<br />

pensée de Descartes, Malebranche,<br />

ainsi que Bossuet a eu la<br />

clairvoyance de le deviner, marquait-il le passage logique qui,<br />

au sortir du cartésianisme chrétien, fait apparaître le cartésia<br />

nisme libre-penseur (3). »<br />

De fait, dans ses premières œuvres, Malebranche ne fait<br />

qu'effleurer la question du miracle. Il n'est pas de ceux qu'un<br />

prodige conquiert. Son esprit est trop élevé pour subir le prestige<br />

fortes pour<br />

de l'extraordinaire, ses exigences rationnelles trop<br />

reléguer la foi dans un domaine privilégié. Comme son Aris-<br />

tarque, il est de ces chrétiens qui disent : « J'en suis convaincu<br />

par la foi, mais je vous avoue que je n'en suis pas pleinement<br />

convaincu par la raison (4). » Il a même des formules singulière<br />

ment hardies : « L'évidence, l'intelligence, est préférable à la<br />

foi. Car la foi passera, mais l'intelligence subsistera éternelle<br />

ment (5). » La foi en effet n'est pas par essence différente de la<br />

raison : « La foi est véritablement un grand bien, mais c'est<br />

(1) P. La Behthonnièhe, ibid. (p. 512). Cf. également M. Blondel, Le<br />

Christianisme de Descartes (in Revue de Métaphysique et de Morale, 1896,<br />

p. 551-567); Henri Gouhier, La Pensée religieuse de Descartes (Paris, Vrin,<br />

1924).<br />

(2) Ibid., p. 620.<br />

(3) Blondel, article cité (p. 567).<br />

(4) Conversations chrétiennes (Pari3, Migeot, 1676; citation, édit. Genoude,<br />

1837, t. I, p. 196 b).<br />

(5) Traité de morale (Cologne, d'Egmont, 1683; édit. Joly, Paris, Thorin,<br />

1882, p. 20).

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