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SPINOZA

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€ LE TRAITÉ THÉOLOGICO-POLITIQUE » 141<br />

en ne reconnaissant aucun effet de la Providence divine dans leur<br />

conservation, c'était par même moyen mettre en compromis toute<br />

certitude de cette parole divine (1). » Aucune église, aucun croyant<br />

ne pouvaient suspendre la vérité de la religion aux caprices d'une<br />

critique qu'une autre pouvait infirmer, ou laisser saper le texte<br />

qui servait de base à leur créance et de preuve à leurs décisions.<br />

Ce serait pourtant une erreur de prendre notre rusé Dieppois<br />

pour un naïf. Richard Simon n'a rien d'un La Peyrère; si le<br />

danger le tente, il sait le reconnaître. Il soupçonne que Spinoza<br />

lui sera toujours reproché comme un scandaleux modèle. Il<br />

n'invoquera donc jamais son témoignage et s'appuiera sur saint<br />

Jérôme, des évêques ou d'érudits Jésuites. Sa préface sera d'une<br />

onctueuse habileté : son but est de concilier la science et la<br />

religion, d'établir un texte critique de l'Écriture sans diminuer<br />

son autorité. Spinoza? C'est un dangereux impie qui prétend<br />

tirer « des conséquences fausses et pernicieuses de ces change<br />

ments et additions, comme si ces réformations étaient purement<br />

humaines ». D'ailleurs, il ne faut pas les multiplier « peu judi<br />

cieusement », mais surtout tenir compte de la qualité des réfor<br />

mateurs, « en quoi Spinoza a fait paraître son ignorance ou plutôt<br />

sa malice (2) ». Mais Richard Simon peut-il éluder les conséquences<br />

logiques d'une méthode dont il accepte tous les principes? Ne le<br />

prenons pas pour un hypocrite, mais c'est un homme habile et<br />

qui, s'il ne veut rien renier des exigences de son esprit, ne tient<br />

nullement à rompre avec l'orthodoxie; s'il n'est pas le pieux<br />

Oratorien que nous peint M. Margival, il est un catholique sincère<br />

et solide; élevé par les Jésuites tout autant que par les Orato-<br />

riens, il sait qu'il n'est aucune impasse pour un dialecticien.<br />

Tout d'abord, en bon moliniste (qu'il restera même dans le<br />

repaire janséniste de la rue Saint-Honoré), il attribue beaucoup<br />

plus d'importance aux dogmes et à l'enseignement de l'Église<br />

qu'au répertoire un peu suranné de figures et de prophéties que<br />

présente l'Ancien Testament. Dans la critique scripturaire, il<br />

ne voit aucun scandale, « nul rapport à la foi ni aux bonnes<br />

mœurs (3) ». D'autre part, en bon philologue, il n'admet pas que<br />

des retouches de détail puissent ruiner « le jugement qu'on doit<br />

faire en gros de toute l'Écriture (4) ». Enfin et surtout, il a une<br />

doctrine toute prête, ingénieuse à souhait, la doctrine des scribes.<br />

(1) Lettre de Spanheim à un amy (édit. R. Leers du Vieux Testament,<br />

p. 567 (1679), appendice).<br />

12) (2)<br />

Ibid., Préface (passim).<br />

3) Ibid., I, chap. 1, p. 6.<br />

■'<br />

p. 6.<br />

Ibid.,

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