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SPINOZA

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<strong>SPINOZA</strong> ET LE PROTESTANTISME FRANÇAIS 85<br />

d'attributs qui puisse distinguer les substances (1)? » Il y a<br />

aussi la position respective; à côté d'une identité logique, « sub<br />

tilité métaphysique qui appartient au traité des précisions men<br />

tales et de l'univocation (2) », il est une identité réelle, comme<br />

celle de deux atomes ou de deux grains de sable, tout à fait compa<br />

tible avec une existence indépendante. Va-t-on croire de même<br />

à l'infinité de la substance? Nouveau sophisme que ce 8e théo<br />

rème (3). Il est impossible de se rallier à cette argutie logique<br />

qui assimile l'existence et l'infinité. Si l'esprit, en concevant<br />

une chose finie, en nie purement l'existence et, en concevant<br />

l'infinité, lui attribue « l'existence, cette belle maxime d'athée<br />

ferait d'une simple pierre, d'un seul homme ou d'un seul cheval<br />

un Dieu infiniment parfait (4) ». En fait, il faut reconnaître que<br />

l'étendue de la matière est bornée par celle de Dieu et l'étendue<br />

de Dieu par celle de la matière : ce sont deux substances diffé<br />

rentes, distinctes, hétérogènes. Rien n'est plus impie que d'at<br />

tribuer l'infinité spatiale à Dieu, car c'est mettre en lui et conférer<br />

à sa nature l'ensemble d'un monde imparfait qui, à côté du ciel<br />

et des anges, comporte l'enfer, les brutes et les démons; c'est<br />

revenir au Jovis omnia plena (5).<br />

L'origine de l'erreur est maintenant visible. Spinoza est issu<br />

de Descartes. Le cartésianisme est le rempart des esprits forts<br />

et des athées. Du jour où l'on conçoit l'espace et le vide comme<br />

une substance réelle et positive, comme une étendue solide, il<br />

n'est plus de distinction possible entre Dieu et la matière; on<br />

ne peut faire coexister l'infinité de la substance étendue selon<br />

Descartes et l'être absolument infini en tout genre de sa théo-<br />

dicée. Il faut donc les assimiler : Spinoza est le continuateur<br />

logique de Descartes. Dans une affectation d'effroi, Aubert<br />

de Versé refuse « cette mer de contradictions (6) », cette accumu<br />

lation de Pélion sur Ossa. Il faut revenir une fois de plus à la<br />

distinction de deux substances pareillement éternelles, Dieu et<br />

la nature. Dieu ne se démontre pas rationnellement par l'idée<br />

d'infini, mais par l'idée de perfection; Descartes et Spinoza<br />

auraient dû se borner à l'argument ontologique : tirer l'<br />

existence<br />

de la perfection est aussi une argutie logique,<br />

pas de<br />

mais ne comporte<br />

conséquence dangereuse. Aubert de Versé préférerait se<br />

passer des idées innées et revenir à une formation empirique de<br />

(1)<br />

L'Impie convaincu (p. 8).<br />

(3) » Toute substance existe nécessairement infinie» (Éth., I,<br />

(4) L'Impie convaincu (p. 21).<br />

(5) Ibid., p. 45.<br />

(6) Ibid., p. 59.<br />

prop. 8).

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