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L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

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utilisent lors de leurs réceptions. La blancheur de sa cape et le<br />

fait que des objets aussi raffinés et aussi fragiles<br />

l’accompagnaient dans ce voyage mouvementé me semblait très<br />

mystérieux. Durgat continua son histoire en grec, ce à quoi je ne<br />

m’attendais guère. Nul doute, elle constituait un atout<br />

important dans le palais de la reine mère. Je m’apprêtai à sortir.<br />

« Tu as le cœur trop tendre et l’estomac trop faible,<br />

commenta Ménon d’un ton sarcastique. Tu n’as pas envie de<br />

connaître le supplice des deux huches ? Alors je vais t’expliquer<br />

moi-même en quoi il consiste. Avant de partir, je me suis<br />

renseigné sur les usages et les coutumes de cette terre afin d’être<br />

à même de réagir si j’étais capturé. Voilà ce dont il s’agit. On te<br />

conduit en plein désert, dans un endroit brûlé par le soleil. On<br />

te ligote, les mains et les pieds et te pousse dans une sorte de<br />

huche, assez grande pour te contenir. On en place une deuxième<br />

dessus, à l’extrémité de laquelle on a creusé un trou afin de<br />

laisser ta tête dépasser en plein air. On étale sur ton visage un<br />

mélange de miel et de lait qui attire mouches, taons et guêpes.<br />

En l’espace de quelques instants, ta peau se couvre d’insectes.<br />

Des araignées, des scolopendres, des scarabées accourent pour<br />

banqueter à leur tour. Ainsi que des fourmis, des milliers de<br />

fourmis affamées. Enfermé dans cette espèce de cercueil, tu ne<br />

peux pas bouger. Une fois le miel dévoré, ces bêtes ignobles<br />

s’attaquent à ta peau et la réduisent rapidement à l’état de<br />

masque de sang.<br />

— Ça suffit ! m’écriai-je.<br />

— Tu peux t’en aller, répondit Ménon. Personne ne te<br />

retient. »<br />

Mais je restai : ces horreurs avaient un étrange effet sur moi,<br />

comme un poison qui vous endort lentement et vous tourmente.<br />

Je me disais qu’il était juste de tout apprendre au sujet des êtres<br />

humains, de savoir ce que la vie peut vous réserver, qu’on peut<br />

oublier en quelques heures une existence sereine, égayée par<br />

des enfants, par un être aimé qui vous respecte, par une belle<br />

maison dotée d’une tonnelle et d’un jardin, telle que j’en rêvais,<br />

et regretter d’être né.<br />

La voix de Ménon retentit une nouvelle fois, comme dans<br />

une fable cruelle : « … et ce n’est pas terminé. Chaque soir,<br />

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