26.06.2013 Views

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Le récit de Durgat s’achevait lorsque Xéno apparut. Se<br />

trouvant nez à nez avec Ménon de Thessalie, il l’interrogea :<br />

« Que fais-tu ici ?<br />

— Je passais par là.<br />

— Eh bien ! passe ailleurs. » Je vis la main de Ménon glisser<br />

vers la garde de son épée, mais je plantai mes yeux dans les<br />

siens afin de le dissuader d’utiliser son arme. Il secoua sa tête<br />

blonde et ricana. « Une autre fois, écrivain. Nous en aurons bien<br />

le temps. En attendant, dis à ta belle de te raconter ces histoires.<br />

Elles t’intéresseront. » Et il s’éloigna, son absurde cape blanche<br />

gonflée par le vent, comme une voile.<br />

Je demandai à Durgat si elle préférait retourner auprès de la<br />

reine ou nous accompagner. « Tu es libre, mais c’est à toi de<br />

décider. Si tu nous accompagnes, sache que nous atteindrons la<br />

côte dans quelques mois. Il y a là des villes magnifiques qui<br />

donnent sur la mer, un bon climat et des champs fertiles. Tu<br />

pourrais peut-être te marier avec un gentil garçon et fonder une<br />

famille. »<br />

Durgat baissa la tête. C’était une jolie fille aux cheveux et aux<br />

yeux très noirs, au teint brun. Elle s’habillait avec une certaine<br />

élégance et portait au cou une petite ambre qui pendait à un fil<br />

d’argent.<br />

« Tu es très gentille, mais je suis en sécurité chez la reine. Il<br />

suffit de n’avoir ni oreilles ni yeux, de ne pas voir, de ne pas<br />

entendre, d’obéir, y compris lorsqu’on ne te dit rien, de prévoir<br />

les pensées de ma maîtresse et de satisfaire chacun de ses<br />

désirs… Alors, tout va bien. »<br />

Ce « tout va bien » me surprit dans la bouche d’un être qui<br />

avait assisté à des actes d’une férocité inimaginable, qui était au<br />

service d’une bête humaine capable d’une cruauté sans limite et<br />

de brusques changements d’humeur. Nul doute, lorsqu’on est<br />

privé de sa liberté et de sa dignité, on s’adapte à tout.<br />

Durgat poursuivit : « Tu agis certainement par amour, et je<br />

te comprends. Moi, cette vie ne me convient pas, mais ce n’est<br />

pas la seule raison… » Elle s’interrompit en posant sur moi un<br />

regard intense, un regard qui contenait un message, comme le<br />

142

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!