26.06.2013 Views

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

— Et quelle est cette cause ?<br />

— Sauver l’armée, sauver les Dix Mille. Ils constituent notre<br />

patrie commune, chacun de nous est le sujet et l’objet du<br />

combat, de la valeur, du courage. Tu comprends ?<br />

— Je comprends, mais je n’éprouve pas la même confiance<br />

que toi.<br />

— Nous sommes dans l’Empire perse. Juges-tu étrange<br />

qu’on essaie de nous anéantir ? Les Arméniens étaient menés<br />

par des officiers perses et obéissaient à un satrape. Il se nomme<br />

Tiribaze. Ils continueront de nous attaquer, mais nous sommes<br />

prêts.<br />

— Je le sais. Je ne suis qu’une femme ignare, mais n’oublie<br />

pas que les femmes voient et sentent ce qui échappe aux<br />

hommes. Quand il n’y aura plus d’ennemis capables de vous<br />

affronter, il en surgira d’autres là où tu ne l’aurais jamais<br />

imaginé.<br />

— Que veux-tu dire ?<br />

— Rien. Mais ce jour-là, souviens-toi de mes paroles. »<br />

Je contemplais à ses côtés la lune qui se levait, tandis que<br />

retentissaient dans le campement les hurlements et les lazzis,<br />

les cris de joie des filles, les appels des sentinelles retentissant<br />

d’un mamelon à l’autre, les noms des camarades qui<br />

s’apostrophaient afin de refouler l’obscurité, de faire savoir aux<br />

forces obscures et invisibles de la nuit que le sommeil ne plierait<br />

pas leur obstination.<br />

Puis les bruits de la fête finirent par s’atténuer et par mourir.<br />

Quand le silence s’abattit sur le campement, la sonnerie de la<br />

trompette résonna, solitaire, et la relève s’opéra.<br />

Xéno me conduisit sous sa tente et m’aima avec passion,<br />

mais dans un silence total. Pas un mot, pas un soupir. Les<br />

paroles que j’avais prononcées avaient l’allure d’une prophétie<br />

lugubre, et il n’en avait pas d’autres à leur opposer, pas même<br />

des mots d’amour.<br />

Plus tard, je le vis se lever et, muni d’une coupe en argent<br />

remplie de vin, gagner la rivière que nous avions laissée derrière<br />

nous. Il offrit une libation à la divinité tourbillonnante parce<br />

qu’il y avait répandu du sang, contaminant ses eaux très pures.<br />

235

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!