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L'armee%20perdue%20-%20Valerio%20Manfredi.pdf

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— Il ne faut pas qu’elle bouge : le bébé doit naître. Cela ne<br />

saurait tarder. Laisse-moi ton serviteur et ton mulet, nous vous<br />

rejoindrons. Il ne sera pas difficile de suivre vos empreintes<br />

dans la neige. »<br />

Xéno accepta, quoique à contrecœur. « Ne commets pas<br />

d’imprudences, fais attention ! » dit-il en me saluant d’un geste<br />

de la main. Il poussa son cheval le long de la colonne pour<br />

prendre la tête de ses éclaireurs.<br />

Il continuait de neiger et les bruits de l’armée en marche<br />

s’atténuaient de plus en plus. Le domestique était inquiet et<br />

troublé. « Partons, ne cessait-il de répéter. Nous ne pouvons pas<br />

attendre. Si nous nous retardons trop, nous serons perdus.<br />

— Encore quelques instants, encore quelques instants, le<br />

petit va naître », répondais-je, de moins en moins convaincue.<br />

Lystra était si fatiguée qu’elle ne parvenait pas à pousser.<br />

J’essayais de l’aider en appuyant sur son ventre, je criais :<br />

« Pousse ! Donne le jour à ton fils, petite traînée, accouche de ce<br />

fils de mille pères ! » Plus le temps passait, plus je me sentais<br />

impuissante et angoissée. La pensée d’échouer dans ma lutte<br />

contre le temps m’oppressait.<br />

Je hurlais, j’implorais en pleurant et sanglotant : « Pousse,<br />

mets au monde ce bâtard, allez, malheur à toi, pousse ! » Et<br />

encore : « Xéno, Xénoooo ! » comme s’il pouvait m’entendre ou<br />

m’aider.<br />

Lystra était pâle, glacée et couverte de sueur. Des cernes<br />

noirs et profonds soulignaient ses yeux. Son souffle n’était plus<br />

qu’un sifflement douloureux.<br />

Elle posa sur moi un regard plein de mélancolie et d’effroi et<br />

dit d’un filet de voix : « Je n’y arrive pas. Pardonne-moi, je n’y<br />

arrive pas.<br />

— Mais si ! Pousse, malédiction ! J’aperçois ses cheveux,<br />

donne-lui le jour, mets-le au monde ! »<br />

Les joues sillonnées de larmes, elle me fixa un moment<br />

encore, puis elle renversa la tête et se figea, les yeux ouverts sur<br />

la neige que le ciel déversait, impassible.<br />

Je la saisis par les épaules. « Ne meurs pas, ne meurs pas,<br />

réveille-toi, allez, courage, je t’emmène, je t’emmène ! » Je ne<br />

savais pas ce que je disais, je prononçais des mots privés de sens<br />

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