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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

***<br />

Comme on le sait, c’est dans l’introduction de 1901 aux fameuses Logische<br />

Untersuchungen que Husserl formula pour la première fois ce qui devait devenir le mot<br />

d’ordre de toute la phénoménologie : « Nous voulons retourner aux choses ellesmêmes<br />

». Il s’agit donc, en phénoménologie, de reconduire la pensée philosophique<br />

vers les choses même à penser, c’est-à-dire vers les phénomènes. Mais qu’est-ce qu’un<br />

phénomène ? On connaît la réponse inaugurale que Husserl apportera à cette question :<br />

un phénomène, c’est un vécu. Sans entrer dans la très difficile question du statut du<br />

vécu en phénoménologie (Cf. La question du vécu en phénoménologie, 1994), précisons<br />

seulement que cette notion implique tout à la fois que la chose pensée n’est pas<br />

absolument indépendante de la perception que j’en ai, et que cette dernière m’est donc<br />

d’une certaine manière manifeste, qu’elle m’apparaît. Mais à côté de ce mot d’ordre<br />

apparaît un deuxième motif essentiel à la phénoménologie. Dès L’Introduction du<br />

second tome des Recherches logiques, Husserl formule en effet une seconde exigence ;<br />

il écrit donc que la difficulté pour le philosophe réside en ceci qu’il doit s'efforcer de<br />

« laisser agir sur lui-même les rapports phénoménologiques dans leur pureté », sans les<br />

troubler par « quelques immixtion de l'objectivité intentionnelle » 11 . Pour reprendre le<br />

cadre des Recherches logiques, s’il s’agit de clarifier le fondement des idéalités logicomathématiques,<br />

il faut donc d’abord que le fondé, c’est-à-dire les idéalités, soit<br />

suspendu du circuit de la description. On l'aura compris, on retrouve ici en germe la<br />

future réduction phénoménologique qui ne verra le jour qu’en 1905. Mais à y bien<br />

regarder, cette situation est hautement paradoxale. Et ce, parce qu’elle implique tout<br />

d’abord une espèce de scission du moi qui n’est pas sans faire penser à la situation mise<br />

en scène magistralement par Hegel au début de sa Phénoménologie de l’Esprit : il faut<br />

considérer un « moi supérieur » – le moi phénoménologisant dira Fink – ayant comme<br />

thème la vie pensée naïvement par un « moi inférieur », tandis que le « moi supérieur »<br />

surmonte radicalement toute naïveté de la pensée et de la connaissance 12 ; comme dans<br />

la Phénoménologie de Hegel, c’est à une conscience philosophique de rendre compte de<br />

11 Recherches logiques, tr. fr., p. 14, cité par Richir dans RP, I, 13.<br />

12 Nous reprenons les expressions de « moi supérieur » et de « moi inférieur » à Husserl lui-même. Cf. E.<br />

Husserl, Phänomenologische Psychologie, Vorlesungen Sommersemester 1925, herausgegeben von W.<br />

Biemel, M. Nijhoff, 1962, p. 374. Nous nous inspirons aussi du commentaire que donne Richir de ce<br />

texte dans Le problème du psychologisme : quelques réflexions préliminaires, 1969, pp. 117-121.<br />

206 <strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com

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