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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

sinon que ce destin, qui se décide dans l’instant, est en un sens toujours déjà scellé dans<br />

l’articulation ontologique que la décision instantanée décide entre le passé de l’étant-été<br />

et le futur de l’avenir ? Donc dans la préfiguration du futur que le passé en reçoit<br />

rétrospectivement, en prenant figure dans ce qui s’en révèle, à mesure, comme<br />

l’accomplissement du destin, lequel, en retour, ne peut se reconnaître tel que par la prise<br />

de sens progressive de ce qui s’accomplit dans la figure du passé, et demeure obscure<br />

comme tel en ce qui ne s’est pas encore accompli et continue de garder l’énigme encore<br />

à découvrir du passé et du futur ? » (Phénoménologie et psychiatrie, pp. 99-100). Tout<br />

le problème de cette conception heideggerienne de la temporalité est donc que, pour être<br />

trop axée sur une « conception tragique du kairos », c’est-à-dire de l’instant, elle<br />

empêche toute aventure du temps et de l’Histoire, ne laisse aucune place dans<br />

l’historicité pour l’imprévisible et l’inconnaissable (Cf. ibid., p. 100). On retrouve le<br />

« fantasme métaphysique » dont nous parlions plus haut, et qui prend ici la figure d’un<br />

fantasme de maîtrise du temps et du destin dans l’instant: « C’est donc l’idée que<br />

quelque chose comme un destin puisse être saisi, ou tout au moins pressenti ou deviné<br />

dans le coup d’œil (Augen-blick) de l’instant, qui nous paraît sujette à caution. A tout le<br />

moins l’idée que la résolution devançante sous l’horizon de la mort y suffise en y<br />

conduisant, fût-ce par d’infinis et de subtils détours » (Ibid., p. 102). Mais le fantasme<br />

métaphysique peut aussi prendre la figure du fantasme totalitaire : car « les<br />

totalitarismes sont tout à la fois un fantastique machin (Gestell) symbolique de la mort,<br />

se dispersant en une multitude de machins et de machinations, et un non moins<br />

fantastique activisme vide, porté par ce que H. Arendt a si bien diagnostiqué comme “le<br />

mouvement pour le mouvement”. Course à l’abîme, machination aveugle de la mort et<br />

de la dette, où l’ipse, en quelque sorte, n’est censé se retrouver que dans la solitude de la<br />

mort, dont la mort effectivement administrée, presque quotidiennement rappelle chaque<br />

jour l’imminence » (SP, 389). On sait que l’aporie spéculative à l’œuvre dans le<br />

fantasme métaphysique peut toujours se transposer à un niveau existentiel, comme ce<br />

fut le cas pour Heidegger dans les événements autour de 19<strong>33</strong>. Même s’il conviendra<br />

toujours de distinguer les deux niveaux 69 : le spéculatif et l’existentiel ; si l’on peut (et<br />

en un sens si l’on doit) montrer que l’engagement nazi et l’œuvre philosophique de<br />

Heidegger trouvent chacun leur source dans cette même structure « fantasmatique » de<br />

69 Par exemple, l’origine du contre-sens du mouvement existentialiste aura été d’avoir confondu les deux<br />

plans existential et existentiel (Cf. Heidegger et la question du temps, F. Dastur, PUF, Paris, 1990).<br />

<strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com 255

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