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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

comme « contenant quelque chose de certain et d’indubitable » (MM, 30). Mais il est<br />

remarquable, dans le parcours des Méditations métaphysiques, que le doute devra être<br />

poussé jusqu’à l’hyperbole, « comme ne le fera jamais Husserl, si ce n’est en de fugitifs<br />

moments des Méditations cartésiennes » (MP, 78) ; car pour pouvoir arriver à la<br />

« feinte » que tout cela – « le ciel, l’air, la terre, les couleurs, les figures, les sons et<br />

toutes les choses extérieures » (MM, <strong>33</strong>-34) – pourrait être une « illusion » ou une<br />

« tromperie », il faut supposer « un certain mauvais génie » qui « a employé toute son<br />

industrie à me tromper » (MM, 34). Mouvement de pensée subtil et complexe, qui<br />

amorce ce qu’il convient d’entendre par « doute hyperbolique », et que Richir<br />

commente en ces termes : « C’est dans ce mouvement très étonnant, d’une audace<br />

encore propre à nous surprendre, de dissolution de tous les repères symboliquement<br />

institués de la connaissance – dans cette fiction d’un sol qui se dérobe dans l’abîme –,<br />

que Descartes introduit, de façon très remarquable, le recul du “sujet”. Comme si la<br />

fiction, en effet, était inconsistante, contradictoire, fuyante, comme si, en un sens, elle<br />

n’engageait à rien, puisque, si l’on en restait là (“Mais il ne suffit pas d’avoir fait ces<br />

remarques, il faut encore que je prenne soin de m’en souvenir”), tout ce qui a été<br />

révoqué en doute, surtout dans l’hyperbole, ne tardera pas aussitôt à reprendre ses<br />

droits : il me faut donc, pour me tenir à la hauteur de l’hyperbole, prendre “un parti<br />

contraire”, employer “tous mes soins à me tromper moi-même, feignant que toutes ces<br />

pensées sont fausses et imaginaires” (nous [Richir] soulignons). La fable ou la fiction ne<br />

se soutient que d’une feinte, qui est un faire semblant actif, un faire comme si, qui est<br />

déjà tout différent du suspens sceptique. C’est donc à moi qu’il revient de faire la<br />

supposition d’ “un certain mauvais génie, non moins rusé et trompeur que puissant, qui<br />

a employé toute son industrie à me tromper”. Il revient à “ma puissance de suspendre<br />

mon jugement”, et c’est par là que je “préparerai si bien mon esprit à toutes les ruses de<br />

ce grand trompeur que, pour puissant et rusé qu’il soit, il ne pourra jamais rien<br />

imposer”. » (DHM, 113) Il faut donc insister que tout le mouvement du doute<br />

hyperbolique tient finalement à la liberté du sujet ; et celle-ci « apparaît tout d’abord<br />

comme la liberté de l’épochè, de la suspension de mon jugement » (DHM, 114). On<br />

peut peut-être rappeler, dans le même sens, et même si Richir ne cite pas ce texte, que la<br />

liberté est une notion inaugurale dans les Méditations métaphysiques ; dès la deuxième<br />

page, en effet, alors que Descartes formule son projet, on peut lire : « […] je<br />

<strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com 301

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