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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

naturellement doués de lumière » (VI 82 , 49). Faire tenir ensemble ces deux possibilités<br />

sans qu'elles s'annulent, tel est le projet. Mais le problème ainsi posé se heurte aussitôt à<br />

un deuxième obstacle : celui de la philosophie réflexive ou de la philosophie de la<br />

conscience (Cf. VI, 49-74 et SPV, 128-130). « En elle, pour ainsi dire, la feinte se prend<br />

elle-même pour objet pour surgir d'elle-même en transparence en tant que pensée »<br />

(SPV, 128). Autrement dit, « la réflexion ouvre une “troisième dimension” (VI, 49) où<br />

les deux composantes antinomiques de la foi perceptive s'homogénéisent dans la pensée<br />

de percevoir et d'imaginer, et ce milieu translucide d'idéalité donne l'illusion de pouvoir<br />

maîtriser ce qui relève de l'illusion et ce qui relève de la vérité, en ce qu'il donne<br />

l'illusion de trouver les raisons de l'un et de l'autre dans le déploiement supposé sans<br />

faille du sujet pensant – lequel ne garde de la foi perceptive que la conviction d'aller aux<br />

choses dans ce qui n'est jamais que l'illusion d'une pure auto-apparition de l'esprit (VI,<br />

50-53) » (SPV, 128). C'est bien sûr Descartes qui est ici visé, mais également, comme le<br />

note Richir, « tout le côté “cartésien” de Husserl » (Ibid.). La position de l'attitude<br />

réflexive peut paraître « inexpugnable » si l'on ne prend garde à une autre antinomie<br />

qu'elle engendre de manière sous-jacente. « Il y a en effet dans la réflexion un<br />

nécessaire point aveugle en ce que, d'une part, dans l'homogénéisation qu'elle effectue,<br />

elle vient toujours après coup, a posteriori, après l'énigme du monde qu'il s'agit<br />

d'interroger, et que, d'autre part, dans le même mouvement, elle prétend expliquer a<br />

priori cette même énigme avec les moyens mêmes que lui offre son institution a<br />

posteriori, remonter pour ainsi dire en régime de pensée ou d'idéalité la constitution a<br />

priori du monde qui, toujours déjà, s'est effectuée avant elle et sans elle. » (Ibid., 129)<br />

On notera au passage l'étroite parenté avec les analyses du « simulacre ontologique »<br />

que Richir élaborait à la même époque dans ses Recherches phénoménologiques<br />

(premier tome : 1981) 83 . La conclusion est similaire : l'attitude réflexive ne conduit qu'à<br />

une « fiction de phénoménologie, à un artefact qui convertit le phénomène en pensée de<br />

phénomène, qui est censée, par une illusion constitutive, être adéquate au phénomène<br />

lui-même » (Ibid., 129). La tâche, encore une fois, est d'assumer l'antinomie, d'oser nous<br />

82 Nous citons de la sorte Le visible et l’invisible (déjà cité).<br />

83 La critique merleau-pontienne des philosophies réflexives influencera beaucoup Richir dès le début.<br />

C’est très clair, déjà, dans ses premiers travaux, où il reprend telle quelle la critique du point de vue de<br />

survol et de la « diplopie ontologique » qui en résulte. Mais c’est aussi très clair dans les Recherches<br />

phénoménologiques, où, même si Richir ne prend plus son point d’entrée dans le paradigme de la vision si<br />

cher à Merleau-Ponty, sa critique des philosophies modernes part du même principe.<br />

268 <strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com

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