10.06.2014 Views

Descargar número completo (3,33 MB) - Eikasia

Descargar número completo (3,33 MB) - Eikasia

Descargar número completo (3,33 MB) - Eikasia

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

Penser le phénomène comme rien que phénomène : le projet pourrait bien paraître<br />

au premier abord absurde. Pas vraiment, cependant, si l’on songe que pour Richir, la<br />

question du phénomène en tant que rien que phénomène se rencontre en fait au cœur<br />

même des œuvres husserliennes et heideggeriennes, ainsi que nous l’avons montré dans<br />

notre première section. Or, nous l’avons aussi constaté, l’accès aux phénomènes se<br />

targue d’une méthode d’approche subtile et complexe, cela même que Husserl baptisait<br />

dès 1905, la réduction phénoménologique. C’est très tôt (Cf. PTE, 18), dans le parcours<br />

tel qu’il se déploie dans Phénomènes, temps et êtres, que l’on se voit confronté à ce qui<br />

paraît bien être la thèse centrale de Richir, et où il va en fait de sa propre version de la<br />

réduction phénoménologique : pour accéder au phénomène, dit en substance Richir, il<br />

faut mettre hors-circuit toute déterminité et toute positivité – tout concept déjà<br />

disponible ou a priori – et ce, dans la mesure même où ces dernières sont extrinsèques<br />

au phénomène lui-même, dans la mesure, donc, où elles sont données au phénomène par<br />

ailleurs – et nous verrons que cet « ailleurs » n’est autre que l’ « institution<br />

symbolique ». Ou encore, pour reprendre le langage kantien, on pourrait dire que le<br />

problème phénoménologique ultime consiste en ce que la pensée du phénomène « se<br />

doit d’éviter toute pensée judicative déterminante qui pré-déterminerait d’avance la<br />

quiddité du phénomène en général. » (PTE, 20). On mesure combien cette<br />

réappropriation richirienne de la réduction phénoménologique, pour garder l’esprit de<br />

son initiateur, s’en distingue nettement : il n’est plus question ici de mettre hors circuit<br />

(par l’epokhè) la structure sujet-objet empirique pour mettre à jour la structure sujetobjet<br />

transcendantale ; il s’agit en fait de continuer ce mouvement amorcé par Husserl<br />

pour mettre en suspens la structure transcendantale elle-même (au sens husserlien), et de<br />

considérer le phénomène rapporté exclusivement à sa phénoménalité. Et cela demande<br />

rien moins que de sortir du régime classique de penser de la philosophie – de<br />

l’institution symbolique de la philosophie – qui, on le sait, identifie et détermine les<br />

phénomènes au lieu de la tautologie symbolique entre être et penser.<br />

Le paradoxe qui surgit aussitôt que l’on tente d’entrer dans un tel régime de<br />

penser sous l’indice de la réduction phénoménologique ainsi comprise, est que le<br />

phénomène est dès lors à penser comme une foncière non-identité à soi. C’est dire,<br />

donc, que « comme Husserl, Heidegger et Merleau-Ponty en ont fait l’épreuve concrète,<br />

le phénomène comme rien que phénomène est bien ce qu’il y a de plus insaisissable et<br />

296 <strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!