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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

toujours ce qui est dit et reconnu comme ce qu’il y avait à dire. Richir interprète plutôt<br />

le Dit comme le sens lui-même comme sens-de-monde ; ou encore, le Dit est ce qu’on<br />

appelle classiquement la pensée, cela même que la parole articulée (ou l’écriture) est<br />

censée « exprimer », ou même la pensée en tant qu’elle se dit dans et hors la parole,<br />

entre les lignes et les signes (Cf. Temps/espace, proto-temps/proto-espace, p. 139).<br />

Toute la problématique tient en ce que Heidegger précise que le Dit est apophantique 73 ;<br />

manière de dire que le Dit est déjà en lui-même langage, ce qui nous conduit à une<br />

situation extrêmement subtile où il s’agit de saisir le déploiement du Dit en tant que<br />

langage en vue et à l’écoute de lui-même, selon un mouvement qui n’est autre que le<br />

mouvement même de l’Ereignis. Le Dit, précise Heidegger, est un montrer (Zeigen) qui<br />

laisse apparaître ce qui entre et sort de la présence (Cf. UP, 257 ; AP, 244). Et si ce qui<br />

se montre dans le Dit se montre soi-même, c’est que ce mouvement du montrer est celui<br />

d’un Ereignis où le Dit en tant que langage et dans son frayage (ou dans son chemin<br />

vers et à l’écoute de lui-même) « ajointe » l’éclaircie (Lichtung) « dans son libre »<br />

comme lieu de tout paraître – ce en quoi d’ailleurs le Dit est bien apophantique sans<br />

retomber pour autant dans la structure d’un nominalisme phénoménologique dont Richir<br />

avait déjà noté le danger chez Husserl. Heidegger précise encore que c’est aussi<br />

l’Ereignis qui interpelle l’homme dans son propre, c’est-à-dire dans le chemin de la<br />

Sprache vers la Sage pour amener l’homme à dire ce qui, d’une certaine manière, s’est<br />

déjà dit, mais « dans le silence » – selon ce genre de formules typiquement<br />

heideggeriennes et passablement insupportables, dont le « vague » est savamment<br />

calculé.<br />

Toute la question tient donc dans la mise-en-chemin (Be-wegung) de la Sage –<br />

selon la formule paradigmatique : « die Sprache als die Sprache zur Sprache bringen »<br />

(UP, 261; AP, 250) – par où, comme l’écrit aussi Heidegger, l’Ereignis parle dans la<br />

Sage (Cf. US, 266; AP, 255). Et cette mise en chemin a sa place au sein du monde : on<br />

le sait, pour le second Heidegger, la parole tout comme la chose (Ding) – on pense à la<br />

célèbre conférence de 1951 – s’ancre dans l’abîme de l’origine du monde, c’est-à-dire<br />

au milieu et dans le jeu des quatre-de-monde. Comme l’a souvent écrit Richir, on<br />

touche ici à un des lieux les plus « énigmatiques » de la pensée heideggerienne par où le<br />

73 Unterwegs zur Sprache, Neske, Pfullingen, 1959, pp. 252-253 ; tr. fr. Acheminement vers la parole,<br />

Gallimard, Paris, 1976, pp. 239-240. Nous citons désormais par les abréviations suivante : UP et AP.<br />

<strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com 259

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