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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

lecture de Farias. Une telle compréhension, répond Richir, doit s’effectuer dans le cadre<br />

d’une compréhension globale de la modernité – mais aussi, précise-t-il avant d’en<br />

ébaucher l’analyse, dans une réflexion sur le contexte allemand de la philosophie dans<br />

lequel se situe Heidegger (cf. Ibid., p.78) 52 . Plus encore, il s’agit de réfléchir le rapport<br />

entre « philosophie » et « politique », entre theôria et praxis, non seulement tel qu’il a<br />

été élaboré, pensé et pratiqué avec la modernité, mais aussi, plus profondément, avec<br />

l’institution même de la philosophie à ses origines grecques. Mais pour en rester ici à<br />

Heidegger, Richir nous explique qu’un des ponts, au moins, qui relia l’engagement et la<br />

pensée de Heidegger fut le « style » ou le « ton » qu’il donna à son œuvre (mais peutêtre<br />

aussi à sa vie !) ; il s’agit du « ton mégalomaniaque en philosophie » – cela même,<br />

sans doute, qui faisait dire à H. Arendt qu’il était le « dernier des romantiques ». Car,<br />

comme le rappelle Richir, Heidegger « a dû penser de manière très mégalomaniaque,<br />

qu’il était, au moins depuis la fin des années 20 jusqu’aux années 30, pratiquement le<br />

seul à intégrer en lui-même toutes les composantes de la culture allemande dans son<br />

“authenticité”, et par là, les composantes essentielles de la culture occidentale dans sa<br />

“grécité” » (Ibid., p. 81). Ce serait donc de cette fantasmagorie que procéderait<br />

l’engagement de Heidegger auprès des nazis. En effet. Il s’agit de comprendre que dans<br />

le creux de ce « ton mégalomaniaque », vient se loger ce que Richir appelle le<br />

« syndrome de Syracuse » (Ibid., p. 79). Autrement dit, il y aurait dans la pensée<br />

heideggerienne un certain platonisme, constitutif de sa mégalomanie propre et de son<br />

« aventure syracusaine » propre 53 ; mais d’un platonisme certes réaménagé : « plus que<br />

dans la remise à jour de la théorie des Idées, sur laquelle Heidegger s’est expliqué par la<br />

suite dans son texte sur Platon, son platonisme, paradoxal, consiste dans cette croyance,<br />

dont il ne s’est en fait jamais tout à fait départi, que c’est à la philosophie que revient le<br />

mode d’accès privilégié et par excellence à la vérité, et de là, le pouvoir d’apprécier en<br />

vérité l’Histoire et le politique » (Ibid., p. 82). Un ultra-platonisme, même, car<br />

Heidegger se considérait non seulement comme un philosophe, mais aussi, en un sens,<br />

52 Notons que ce contexte et les questions qu’il pose furent traités inauguralement par Richir alors qu’il<br />

commentait les Considérations sur la Révolution Française de Fichte dans son bel essai : Révolution et<br />

transparence sociale (1973).<br />

53 Richir évoque à ce propos des « travaux en cours » de Jacques Taminiaux, montrant qu’à l’époque de<br />

l’ontologie fondamentale, Heidegger était plus platonicien qu’aristotélicien, quoi qu’il ait pu en dire luimême.<br />

Il s’agit, bien sûr, des Lectures de l’ontologie fondamentale (Ed. J. Millon, Grenoble, 1989) et de<br />

son essai sur Arendt et Heidegger : Le penseur professionnel et la fille de Thrace (Ed. Payot, coll.<br />

« Critique de la politique », Paris, 1992).<br />

240 <strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com

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