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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

grecque de la royauté est fort subtile : le roi trouve sa légitimité des dieux, garants du<br />

cosmos; il est donc le moyen terme entre hommes et dieux, manifestant le corps de la<br />

société vis-à-vis des dieux, et représentant les dieux pour les hommes. Toute la<br />

difficulté, on l’aura compris, consiste en la conciliation de ces deux pôles : le roi n’est<br />

ni homme ni dieu, et s’il en vient à paraître comme l’un ou l’autre, il tombe dans la<br />

tyrannie; la conception grecque de la tyrannie est à cet égard assez éloquente. Un tyran<br />

peut être un « bon roi », sa tyrannie résidant seulement en son hubris, c’est-à-dire en ce<br />

qu’il cherche à trouver sa légitimation par lui-même - que ce soit en ne reconnaissant<br />

pas la puissance des dieux, ou en se prenant lui-même pour un dieu. Dans les récits de<br />

fondations, la tentative de conciliation se fait par généalogisation, par où le roi essaie<br />

de tirer sa légitimité en tant que « descendant » des dieux; mais il est caractéristique que<br />

ces tentatives n’aboutissent pas, sans doute par la trop grande complexité des<br />

généalogies et des lignées mises en jeu.<br />

3) Les récits épiques. On connaît les problèmes relatifs à la datation et à la<br />

composition de l’Iliade et de l’Odyssée : problèmes très anciens, qui avait retenu<br />

inauguralement l’attention de l’abbé d’Aubignac et que l’on connaît aujourd’hui sous le<br />

titre de « question homérique ». Sans ignorer les débats des philologues et historiens,<br />

Richir précise que « pour nous, le plus important est de repérer les caractéristiques par<br />

lesquelles la poésie homérique prend déjà de la distance par rapport aux récits de<br />

fondations qui, pour une bonne part, sont supposés connus » (ND, 69). Mais la<br />

problématique reste en un sens identique : il s’agit toujours d’ajuster les puissances<br />

symboliques divines et humaines; et dans la poésie épique, cet ajustement trouve son<br />

lieu dans la figure complexe du héros.<br />

Plusieurs facteurs sont à prendre en jeu. Tout d’abord, « la sublimisation<br />

accomplie des dieux par la mise en jeu de ce que les Anciens, déjà, reconnaissaient<br />

comme le sublime » (ND, 70) - ce qui indique aussi la distance par rapport aux récits de<br />

fondations. Et Richir de citer les quelques exemples tirés de l’Iliade cités par Longin<br />

(IIIe siècle ap. J.-C.) pour commenter ensuite : « absolument grands et absolument<br />

puissants » (ND, 71), les dieux portent bien les caractères du sublime selon Kant, en ce<br />

qu’ils restent proprement inconcevables mais pas inimaginables. Ensuite, et dans le<br />

<strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com 341

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