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Carlson, Sacha: «L’essence du phénomène»<br />

même formulé l’objection : « L’affaire est-elle close pour autant, et le reste, tout le<br />

reste, doit-il sortir tout simplement des pouvoirs de la philosophie pour entrer dans ce<br />

que nous avons chacun à connaître dans les multiples vicissitudes de la vie ? » (Ibid., p.<br />

231). Mais il poursuit : « Cette solution est toujours possible, et rien n’autorise<br />

personne à dire qu’elle ne soit pas souhaitable. C’est ici l’affaire de la responsabilité de<br />

chacun quant au sens qui lui paraît devoir être donné, mais surtout fait, de sa vie. Mais<br />

cette “solution” est-elle la seule ? N’est-elle pas, pour un philosophe, “solution de<br />

paresse” ? Ne reste-t-il pas à tenir le fragile point d’entrée de la phénoménologie comme<br />

“pensée” (entre guillemets phénoménologiques, puisqu’il s’agit d’un régime, si<br />

l’expression est encore possible, non-tautologique du penser) du phénomène comme<br />

rien que phénomène ? » (Ibid., p. 231) Si en effet, sous la réduction phénoménologique<br />

radicalisée, nous ne nous trouvons devant rien, il s’agit de comprendre que ce rien n’est<br />

pas néant : c’est un « rien d’étant », comme le disait déjà Heidegger, c’est-à-dire, rien<br />

de déterminé, mais aussi, et ce, à l’encontre de Heidegger, rien de déterminant (l’être<br />

comme déterminant l’étant, qui est, pour Heidegger, le « phénomène de la<br />

phénoménologie ») ; il s’agit plutôt, pour reprendre l’expression même de Richir, du<br />

« rien » du « phénomène comme rien que phénomène ». Et toute l’œuvre de Richir tente<br />

de montrer que ce rien peut se donner à l’homme dans les différentes strates de son<br />

existence. C’est déjà le cas dans le domaine de l’art, ainsi qu’en témoigne la conception<br />

kantienne des jugements esthétiques réfléchissants ; on le sait, le propre de tels<br />

« jugements », qui ne sont pas des jugements au sens logique du terme, mais qui portent<br />

sur le « beau » ou le « sublime », est qu’ils révèlent, tout aussi bien et dans le même<br />

mouvement, moi-même ainsi que ce qui est « jugé », comme « plus grand », « plus<br />

vaste » (…) que je ne pouvais l’imaginer (Cf. MP, 53) 108 .<br />

Etrange pensée que celle portant sur le phénomène ; pensée peut-être plus proche<br />

de l’affectivité que la pensée philosophique ; elle met en tout cas en jeu une dimension<br />

encore immémoriale ou sauvage du penser, toute la difficulté consistant à savoir si la<br />

pensée philosophique, avec ses ressources propres, peut atteindre un tel « régime » de<br />

penser. Car enfin, qu’est-ce que penser ? « Bien entendu, nous ne pouvons, sous peine<br />

de tautologie, répondre à cette question de manière univoque. Et pourtant, qu’il y ait une<br />

108 Cf. en outre : F. Pierobon, Kant et la fondation architectonique de la métaphysique, Ed. J. Millon, coll.<br />

« Krisis », Grenoble, 1990.<br />

298 <strong>Eikasia</strong>. Revista de Filosofía, año VI, 34 (septiembre 2010). http://www.revistadefilosofia.com

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