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Genese de la cuisine..

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puis s’é<strong>la</strong>nçaient <strong>de</strong>s fa<strong>la</strong>ises grisâtres <strong>de</strong> jambons fumés à <strong>la</strong> maison, cachant un<br />

peu plus loin une mare <strong>de</strong> sirops et <strong>de</strong> confitures, bornée par <strong>de</strong>s pains <strong>de</strong> sucre<br />

d’érable, <strong>de</strong>s dindons rôtis, <strong>de</strong>s hures <strong>de</strong> porc, <strong>de</strong>s ragoûts <strong>de</strong> pattes <strong>de</strong> cochon, <strong>de</strong>s<br />

civets <strong>de</strong> lièvres, <strong>de</strong>s perdrix rôties, <strong>de</strong>s oies sur pommes, <strong>de</strong>s p<strong>la</strong>rines 40 , du boudin,<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> graisse <strong>de</strong> rôti, tout ce<strong>la</strong> à côté d’une <strong>la</strong>gune <strong>de</strong> tire à <strong>la</strong> crème, heurtée par <strong>de</strong>s<br />

collines <strong>de</strong> tourtières et <strong>de</strong> <strong>la</strong>ngues piquées d’aromates 41 . » Montagnes, <strong>la</strong>cs, fa<strong>la</strong>ises,<br />

mares, <strong>la</strong>gunes, collines : c’est le vocabu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong>s mémorialistes <strong>de</strong> Versailles !<br />

Ce festin est sous bonne gar<strong>de</strong>. Paul E. Monarque raconte qu’à <strong>la</strong> veille <strong>de</strong><br />

Noël : « Il fal<strong>la</strong>it aussi qu’il restât quelqu’un afin <strong>de</strong> préparer le réveillon, complément<br />

presque indispensable <strong>de</strong> <strong>la</strong> Messe <strong>de</strong> Minuit. Les tourtières f<strong>la</strong>irant bon les<br />

épices réchauffent dans le fourneau : les beaux beignes dorés, saupoudrés <strong>de</strong> sucre<br />

rose, sont là sur <strong>la</strong> table à côté <strong>de</strong>s confitures, tandis que dans le tambour, hors <strong>de</strong><br />

l’atteinte <strong>de</strong> Charlot, les têtes en fromage et les guertons refroidissent en attendant<br />

<strong>la</strong> fringale qu’auront les gens <strong>de</strong> <strong>la</strong> messe qui s’en viennent, car on entend le bruit<br />

<strong>de</strong>s grelots qui tintinnabulent dans <strong>la</strong> nuit noire 42 . » Ne disait-on pas : « Si on ne<br />

veut pas être frileux il faut “manger fort 43 ” ? »<br />

La p<strong>la</strong>ce qu’occupe l’alimentation dans notre culture octroie à <strong>la</strong> femme<br />

une importance sans égal. Ces festins sont <strong>de</strong>s triomphes. Les cuisinières, <strong>de</strong>s<br />

reines. Et chacune d’elle a sa propre cour et ses admirateurs inconditionnels.<br />

Albert Tessier 44 (1895-1976) écrit : « Durant cette pério<strong>de</strong> animée, les tournées<br />

<strong>de</strong>s parents tenaient les cuisinières en haleine. Tous rivalisaient d’ingéniosité<br />

pour que les repas <strong>de</strong>s Fêtes soient p<strong>la</strong>ntureux et savoureux. Je m’étais fait une<br />

sorte <strong>de</strong> carte gastronomique, selon mes préférences. Je savais que tante Vénérance<br />

préparait <strong>de</strong>s ragoûts <strong>de</strong> pattes <strong>de</strong> cochon et <strong>de</strong>s saucisses mieux réussis<br />

qu’ailleurs à mon goût, sans omettre ses tartes à <strong>la</strong> ferlouche et ses gâteaux à<br />

<strong>la</strong> vanille. Tante Maria excel<strong>la</strong>it dans <strong>la</strong> soupe aux pois et le sucre à <strong>la</strong> crème.<br />

Il y avait aussi les spécialités <strong>de</strong>s tantes Sarah, Indiana, Hélène, Rose-Anna,<br />

etc… Les pâtés à <strong>la</strong> vian<strong>de</strong>, les ragoûts <strong>de</strong> boulettes, les tartes, les gâteaux, etc.<br />

n’étaient nulle part semb<strong>la</strong>bles. Chaque cuisinière avait ses petits secrets, sa<br />

touche particulière 45 . »<br />

Lorsque <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> l’automne arrive, les premières neiges distribuent généreusement<br />

les sourires sur les visages. Le froid rajoute cette jolie touche <strong>de</strong> rouge aux<br />

joues. Son arrivée sonne le branle-bas <strong>de</strong> combat <strong>de</strong> <strong>la</strong> cuisinière. Elle prépare<br />

alors ses munitions : « Les femmes passent <strong>de</strong>ux semaines à faire <strong>de</strong> <strong>la</strong> pâtisserie.<br />

D’abord elles font <strong>de</strong>s “tourtières” par douzaines, qu’elles mettent à geler dans<br />

184 genèse <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>cuisine</strong> québécoise

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